Lu l’album de Matthieu Bonhomme, et je peux, sans attendre, dire que c’est pour moi une belle réussite.
Remettons les choses dans leur contexte, il ne s’agissait pas de faire un nouveau Lucky Luke, tel que nous le connaissons, mais de rendre hommage à ce dernier dans le cadre de l’anniversaire des 70 ans de sa création par Morris.
A ce titre il est lancé une collection d’albums reprenant les aventures de notre cow-boy solitaire préféré « vu par … » un auteur actuel (ce concept existe déjà notamment pour un autre héros de bd célèbre : Spirou). La difficulté d’un tel travail, est de savoir rester dans l’esprit sans tomber dans le pastiche ou la caricature.C’est donc M. Bonhomme (déjà connu pour son remarquable « Texas Cow-Boys » avec le scénaristeTrondheim) qui ouvre cette série en nous proposant un Lucky Luke dans un style graphique semi-réaliste.
L’histoire commence avec Lucky Luke arrivant dans la petite ville de Froggy Town, précédé de sa réputation de gunfighter. Un comité de citoyen va rapidement lui proposer d’enquêter sur une mystérieuse attaque de diligence au cours de laquelle un indien aurait volé l’or des mineurs du coin.
Un scénario de facture classique au cours duquel on découvrira un cow-boy tirant toujours plus vite que son ombre, mais doté de sentiments et « félures » plus marqués que son original.
On s’amusera à identifier la présence de personnages très « Morrisien » comme celle du croque-mort, ou l’apparition de Laura Legs (la danseuse du «Grand Duc »). L’humour sera également présent avec un « running gag » sur le tabac, que je qualifierai de « santé public ».
En revanche, si Jolly Jumper est bien évidemment présent, il n’est pas doté de la parole et on ne trouvera pas d’apparition de Rantanplan ou des Daltons. Quoique concernant ces derniers, les trois frères Bones (dont le plus jeune attardé mental) et leur père (colérique et violent) pourrait fort s’y apparenter.
De nombreux clins d’œil au western que semble bien connaître et aimer l’auteur sont apparents. Dès le titre de l’album : « L’homme qui tua … », puis en vrac on pourrait citer :
« La cible humaine », pour la réputation de Lucky Luke, les films liés à la fusillade d’OK Corral pour Doc Wednesday, la série Deadwood pour les décors et paysages de l’histoire ainsi que les références à Wild Bill Hickok ou la tombe anachronique d’un certain Charles Hutter côtoie celle de Morris.
Concernant le dessin, je trouve le trait de Bonhomme toujours aussi réussi et son Lucky Luke colle bien à une histoire plus sombre, moins parodique. Nous trouvons quelques très belles cases qui lui permettent plus de détails que le format de Texas Cow-Boys, comme certains paysages, la bagarre du saloon, l’arrivée de nuit et sous la pluie au début de l’album …
Reste le choix de prendre l’album en couleur ou en noir et blanc. C’est là une histoire de goûts personnels, mais l’identité visuelle de Lucky Luke passe aussi par l’utilisation de la couleur de Morris. Et là encore, je trouve que le travail réalisé est remarquable pour retrouver l’esprit des albums d’origines. Si j’avais à choisir, j’opterai donc pour la version couleur. (n’ayant pas voulu choisir, j’ai pris les deux …).
Au final, c’est donc pour ma part, un pari réussi concernant la vision et la réalisation de ce Lucky Luke vu par Matthieu Bonhomme. A tel point que j’aimerai bien avoir une suite à cet essai.
Quelques cases (mes photos ne sont pas de très bonnes qualités
)
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