Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
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- Eager Beaver
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Le Wyatt Earp de W73 me fait penser au sheriff joué par Ward Bond dans le fils du désert de 1948. Une allure pataude qui fait que les nouveaux arrivants le sous-estiment et peuvent rire à ses dépends dans un premier temps, une plaque rangée à l'abris des regards dans la veste, et puis une autorité naturelle qui s'impose en un quart de seconde faisant clairement ressentir la dangerosité du personnage.
La scène finale entre Abel et Caïn se fait dans un décor aux arêtes tranchées. Cette violence crue se fait déjà autour d'un éperon nu, un Naked Spur.
Ce décor d'une dureté sauvage est le seul paysage vertical de l'histoire. Il n'apparaît qu'à la découverte du repaire du méchant (si c'est vraiment la maison familiale, on ne voit pas bien de quoi vivait la famille supposée être dans l'élevage. Si c'est l'antre de Caïn pourquoi s'y est il installé avec la photo de son père qu'il a tué et de son frère qui veut le tuer?).
En y poursuivant son frère Lin doit gravir le chemin de la paix. Il ne va pas commettre le pire des actes puisque son frère a toujours été mauvais. Il ne tue pas son frère, il tue le mal.
Pour en revenir au paysage, je vais faire mon Mussellshell, on est en plein dans ce qu'Edgar Morin a appelé l'anthropo-cosmomorphisme. L'âpreté de la lutte doit transparaître dans toute la nature avoisinante.
Je trouve Millard Mitchell absolument parfait dans son rôle de fidèle compagnon/ange gardien. Il parvient à trouver le ton juste entre tous les archétypes de ce genre de personnage.
La scène finale entre Abel et Caïn se fait dans un décor aux arêtes tranchées. Cette violence crue se fait déjà autour d'un éperon nu, un Naked Spur.
Ce décor d'une dureté sauvage est le seul paysage vertical de l'histoire. Il n'apparaît qu'à la découverte du repaire du méchant (si c'est vraiment la maison familiale, on ne voit pas bien de quoi vivait la famille supposée être dans l'élevage. Si c'est l'antre de Caïn pourquoi s'y est il installé avec la photo de son père qu'il a tué et de son frère qui veut le tuer?).
En y poursuivant son frère Lin doit gravir le chemin de la paix. Il ne va pas commettre le pire des actes puisque son frère a toujours été mauvais. Il ne tue pas son frère, il tue le mal.
Pour en revenir au paysage, je vais faire mon Mussellshell, on est en plein dans ce qu'Edgar Morin a appelé l'anthropo-cosmomorphisme. L'âpreté de la lutte doit transparaître dans toute la nature avoisinante.
Je trouve Millard Mitchell absolument parfait dans son rôle de fidèle compagnon/ange gardien. Il parvient à trouver le ton juste entre tous les archétypes de ce genre de personnage.
- Alec Longmire
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Bien d'accord avec Musselshell sur la présence déjà, dans Winchester 73, des thèmes chers à Mann à travers son cycle (ou sa filmographie westerns de manière générale) : la famille, la communauté, la trahison, et un individu seul et déchiré (Stewart en l'occurrence).
C'est aussi la raison pour laquelle j'aime tant ce film, qui porte en germe ce que Mann étoffera par la suite. Moins fouillé peut-être pour ce qui est de la psychologie des personnages, mais comme il a été dit, tout est déjà là. C'est une "ébauche", mais c'est en même temps complètement réussi.
Pour ce qui est des personnages du frère maudit et de Millard Mitchell, je trouve, tout comme Eager Beaver, qu'ils sont particulièrement intéressants. A mon avis, le frère garde la photo dans la cabane pour deux raisons : la première, bassement matérielle, permet de signifier clairement au spectateur, et à la jeune femme, que les deux rivaux sont effectivement frères, et que l'un est parricide.
Mais au-delà de ceci, je pense que Mann a peut-être également voulu signifier un "méchant" plus complexe qu'il n'y paraît, à la fois criminel monstrueux mais ne pouvant jamais tirer un trait sur ce frère et ce père qui l'ont entouré quasiment toute sa vie. Cette photo est le dernier lien qui le rattache à une famille, une vie "normale", appaisée, qu'il regrette peut-être par moments...
Quant à Millard Mitchell, c'est vrai que son personnage est très classique, celui de l'ami fidèle ; au milieu de tous ces personnages démesurés et passionnés (au sens fort du mot passion, qui ici se traduirait plutôt par haine), il représente la pondération, la mesure. Celui qui ne cautionne pas la violence de Stewart mais qui la comprend et l'assume : et il le suit, quels qu'en soient les risques. Lorsque à la fin il raconte l'histoire de Stewart et de son frère, il les qualifie TOUS LES DEUX d'assassins, sans se voiler la face sur l'attitude de son ami. Mais il la justifie en disant que cela DOIT être (il tue le mal et non son frère, comme le dit Eager Beaver)
C'est aussi la raison pour laquelle j'aime tant ce film, qui porte en germe ce que Mann étoffera par la suite. Moins fouillé peut-être pour ce qui est de la psychologie des personnages, mais comme il a été dit, tout est déjà là. C'est une "ébauche", mais c'est en même temps complètement réussi.
Pour ce qui est des personnages du frère maudit et de Millard Mitchell, je trouve, tout comme Eager Beaver, qu'ils sont particulièrement intéressants. A mon avis, le frère garde la photo dans la cabane pour deux raisons : la première, bassement matérielle, permet de signifier clairement au spectateur, et à la jeune femme, que les deux rivaux sont effectivement frères, et que l'un est parricide.
Mais au-delà de ceci, je pense que Mann a peut-être également voulu signifier un "méchant" plus complexe qu'il n'y paraît, à la fois criminel monstrueux mais ne pouvant jamais tirer un trait sur ce frère et ce père qui l'ont entouré quasiment toute sa vie. Cette photo est le dernier lien qui le rattache à une famille, une vie "normale", appaisée, qu'il regrette peut-être par moments...
Quant à Millard Mitchell, c'est vrai que son personnage est très classique, celui de l'ami fidèle ; au milieu de tous ces personnages démesurés et passionnés (au sens fort du mot passion, qui ici se traduirait plutôt par haine), il représente la pondération, la mesure. Celui qui ne cautionne pas la violence de Stewart mais qui la comprend et l'assume : et il le suit, quels qu'en soient les risques. Lorsque à la fin il raconte l'histoire de Stewart et de son frère, il les qualifie TOUS LES DEUX d'assassins, sans se voiler la face sur l'attitude de son ami. Mais il la justifie en disant que cela DOIT être (il tue le mal et non son frère, comme le dit Eager Beaver)
- Eager Beaver
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Entièrement d'accord avec Alec Longmire sur le sens de la photo, il l'a écrit mieux que je ne comptais le faire.
Le monologue final de Millard Mitchell est en effet très important. Il donne un peu le sentiment de se rattacher à la tradition de la voix off du film noir. Le fait qu'il s'adresse en fait ici à la jeune promise au personnage relativement insipide tient à mon sens davantage de l'habillage formel qu'autre chose.
La mention froide sur l'aspect meutrier des deux frères est en effet à souligner. La question est: cela a t il fonction de transition noyée dans le discours pour permettre de créer une image de couple final pour un pseudo happyending de façade mais imposé par les canons du genre (en jouant sur le fait que la phrase en question est très courte, sans trop d'équivalent tout au long du film, et peut passer totalement inaperçue pour le spectateur de l'époque pas encore habitué au western un peu complexe), ou est une phrase réellement voulue par Mann traçant ainsi le côté très sombre de ses personnages qui fera sa marque de fabrique?
Le monologue final de Millard Mitchell est en effet très important. Il donne un peu le sentiment de se rattacher à la tradition de la voix off du film noir. Le fait qu'il s'adresse en fait ici à la jeune promise au personnage relativement insipide tient à mon sens davantage de l'habillage formel qu'autre chose.
La mention froide sur l'aspect meutrier des deux frères est en effet à souligner. La question est: cela a t il fonction de transition noyée dans le discours pour permettre de créer une image de couple final pour un pseudo happyending de façade mais imposé par les canons du genre (en jouant sur le fait que la phrase en question est très courte, sans trop d'équivalent tout au long du film, et peut passer totalement inaperçue pour le spectateur de l'époque pas encore habitué au western un peu complexe), ou est une phrase réellement voulue par Mann traçant ainsi le côté très sombre de ses personnages qui fera sa marque de fabrique?
- Pike BISHOP
- Marshall
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Le "pré-ground" est un peu artificiel et les explications de HIGH-SPADE ne l'enrichissent guère....
Un frère bon, un mauvais ; voleur puis parricide quand le père refuse de l'aider..On peut essayer de deviner une histoire plus fouillée
à ces deux frères en costard posant avec papa sur la photo...
Si on peut assimiler l'arme à l'objet du diable, comme la nouvelle dont le film est vaguement inspiré..On peut aussi décliner que
l'objet Winchester n'est qu'un outil, il amène bien ou mal suivant la morale de celui qui l'utilise...
La morale est donnée par HIGH SPADE bien avant l'explication finale quand il interroge LIN sur le plaisir qu'il commence à trouver
dans sa traque...Il y a là aussi les prémices des autres films du cycle..LIN n'y trouve pas de plaisir, il faut qu'il le fasse...
Et après ? La vengeance accomplie, que feras-tu ? Question récurrente qu'on peut poser à tous les vengeurs de Western...
Une fois la tâche primordiale finie, comment meubler le vide ? existent-ils sans l'ennemi à détruire..
MANN place là quelques belles phrases.. qui finissent par "Riche celui qui a un ami...Je suis riche!"
LIN est riche, DUTCH HENRY n'a pas d'amis, que des comparses et une photo d'un univers perdu..
Beaucoup de choses visuelles (Les pics acérés et les fusillades étaient déjà présentes dans "LES FURIES") tout l'univers de l'Ouest qui
défile et quelques éléments de psychologie que MANN travaillera de plus en plus dans ses westerns..
Un frère bon, un mauvais ; voleur puis parricide quand le père refuse de l'aider..On peut essayer de deviner une histoire plus fouillée
à ces deux frères en costard posant avec papa sur la photo...
Si on peut assimiler l'arme à l'objet du diable, comme la nouvelle dont le film est vaguement inspiré..On peut aussi décliner que
l'objet Winchester n'est qu'un outil, il amène bien ou mal suivant la morale de celui qui l'utilise...
La morale est donnée par HIGH SPADE bien avant l'explication finale quand il interroge LIN sur le plaisir qu'il commence à trouver
dans sa traque...Il y a là aussi les prémices des autres films du cycle..LIN n'y trouve pas de plaisir, il faut qu'il le fasse...
Et après ? La vengeance accomplie, que feras-tu ? Question récurrente qu'on peut poser à tous les vengeurs de Western...
Une fois la tâche primordiale finie, comment meubler le vide ? existent-ils sans l'ennemi à détruire..
MANN place là quelques belles phrases.. qui finissent par "Riche celui qui a un ami...Je suis riche!"
LIN est riche, DUTCH HENRY n'a pas d'amis, que des comparses et une photo d'un univers perdu..
Beaucoup de choses visuelles (Les pics acérés et les fusillades étaient déjà présentes dans "LES FURIES") tout l'univers de l'Ouest qui
défile et quelques éléments de psychologie que MANN travaillera de plus en plus dans ses westerns..
If they move, kill'em !!
- musselshell
- Castor éclopé
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- Enregistré le : 08 janv. 2006 16:08
Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Que deviennent les héros après la vengeance? Quel est leur sors après le film? S'il ne pose pas directement la question, Mann sait la suggérer, non pas pour donner une réponse, mais pour interroger justement...et cette interrogation, à la fin d'un parcours pourtant victorieux, a toujours un avant-goût de vague inquiétude, d'amertume, de pré-nostalgie... Et çà dans l'image brute, dans la façon dont Mann filme toujours du sensible, à la fois la surface des choses et leur profondeur...qu'il s'agisse de l'espace ou de ceux qui s'y meuvent. Bref, ce que j'essaie de dire, que je sens en tous cas, c'est que la question de la fin et de l'après de l'aventure, la question, en amont, de ce qui la motivait réellement, est là dans le cadre...dans les gestes, les regards de Stewart, dans la façon dont Mann filme l'acteur...Il y a une question de l'"après", du pourquoi, du "que devient-on?" dans les westerns de Mann/Stewart que je ne trouve pas ailleurs, en tous cas jamais posée comme elle l'est là...Ca tient sûrement au style, comme on dit...Cette faculté de passer du clacissisme à l'audace (jamais gratuitement formaliste, toujours au service de ce qu'il y a à dire...), du repos à la violence, de la tendresse au mépris...le tout enchassé dans un espace qui le magnifie...tout çà est assez proche de la vie pour qu'on se laisse aller à une sorte de communion, d'empathie...en même temps qu'on est épaté... James Stewart, sa vulnérabilité affichée, son humanité à la fois fragile et rageuse sont aussi pour beaucoup là dedans...Il y avait quelque chose d'un peu alchimique dans tout çà...
C'est beaucoup trop 255 caractères. Je renonce à apposer une signature.
Ah...c'est la limite haute...
Je renonce quand même. Je sais pas quoi dire, de toutes façons.
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Au risque d'enfoncer le clou au-delà du strict nécéssaire je voudrais dire aussi que dans ce film James Stewart me semble encore un peu vert pour être encore crédible dans ce genre de western qui se veut violent et tragique (même si c'est plutôt raté à mon avis! mais je l'ai déjà dit)
Ici je vois encore le Stewart gauche et timide des comédies de Capra, j'ai presque l'impression de voir George Bailey en train de jouer aux cow-boys avec ses copains (oui je sais j'exagère) ! C'était déjà un peu le cas dans "la fleche brisée" mais dans celui-là il campait un médiateur généreux et pacifique et il y avait une histoire d'amour, ce qui collait parfaitement à l'image de l'acteur à cette époque précise.
Selon moi il faut attendre "Bend of the river" deux ans plus tard pour voir enfin un Stewart sombre, endurci par la rude vie de cow-boy, et parfaitement crédible en homme de l'ouest au passé trouble...
A quoi cela tient-il ? Travail de l'acteur qui s'approfondit avec son metteur en scène ? Maturité de l'homme dépassant la quarantaine ? Réel endurcissement au contact de la nature lors de ces longs tournages en extérieur (auparavant il était un acteur de comédies, donc de studio) ?
Ici je vois encore le Stewart gauche et timide des comédies de Capra, j'ai presque l'impression de voir George Bailey en train de jouer aux cow-boys avec ses copains (oui je sais j'exagère) ! C'était déjà un peu le cas dans "la fleche brisée" mais dans celui-là il campait un médiateur généreux et pacifique et il y avait une histoire d'amour, ce qui collait parfaitement à l'image de l'acteur à cette époque précise.
Selon moi il faut attendre "Bend of the river" deux ans plus tard pour voir enfin un Stewart sombre, endurci par la rude vie de cow-boy, et parfaitement crédible en homme de l'ouest au passé trouble...
A quoi cela tient-il ? Travail de l'acteur qui s'approfondit avec son metteur en scène ? Maturité de l'homme dépassant la quarantaine ? Réel endurcissement au contact de la nature lors de ces longs tournages en extérieur (auparavant il était un acteur de comédies, donc de studio) ?
- musselshell
- Castor éclopé
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
La crédibilité de James Stewart héros de western...la question de savoir si ou quand çà commence est décidément bien récurrente...Ca peut se comprendre, vu le parcours de l'acteur, vu ce qu'il représente...l'Américain moyen, le brave type plein de bonne volonté, naïf et/ou maladroit. Cette crédibilité, pour moi, se loge justement là. C'est parce qu'il amène autre chose que le hiératisme ( débridé/décontracté à la Wayne, "tall silent type" à la Cooper...il y en a d'autres...) ou la virilité triomphante (Douglas ou Lancaster...) que Stewart est crédible. Tout simplement parce qu'il est dans le monde des "gens". De ce point de vue, il a rapproché le western de la simple humanité, toujours fragile, toujours sur le fil ...D'où, paradoxalement, le paradoxal mélange de fascination et de complicité que suscitent ses grands rôles dans le genre...Il est vrai qu'on ne sent pas le même poids chez Lin Mc Adams que chez Jeff Webster...Mais çà tient à mon avis autant à la mise en scène qu'à une évolution de l'acteur...Mann concentre le propos, Stewart répond...
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- Alec Longmire
- Convoyeur de bétail
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Tiens, je n'ai pas du tout la même approche sur le jeu de Stewart dans ce film ! Peut-être parce que justement je ne connais pas (ou très peu) ses comédies antérieures (?). Pour moi, Stewart reste donc associé à son image d'homme de l'ouest.
Il y a des moments de dérision dans Winchester 73, mais pour moi ils ne décridibilisent pas l'ensemble de la nature tourmentée de Lin McAdam.
Je serais plus proche de ce que disait fort justement Musselshell à propos de la manière qu'a Mann de le filmer, cette interrogation implicite qu'il pose, notamment quand il tourne sa caméra vers son regard désabusé, à la fin. On ressent cette fêlure, je trouve, dans le regard baissé, lassé et un peu honteux de Stewart (parce qu'il se sait un assassin, fratricide, et qu'il n'ose regarder en face à la fois son ami et la femme avec qui il pourrait, qui sait, refaire sa vie...). Son jeu colle parfaitement, il me semble, à la tonalité que Mann a voulu imprimer...
De même quand la violence explose, soudainement, après avoir été comme trop longtemps retenue, le visage de Stewart, où tout passe, traduit bien cette irruption...
Autant je serais d'accord avec old timer sur cette image un peu frêle, fragile et (quasi) comique de Stewart dans Femme ou démon par exemple (mais le rôle est effectivement écrit comme ça), autant je n'ai pas vraiment cette impression ici...
Il y a des moments de dérision dans Winchester 73, mais pour moi ils ne décridibilisent pas l'ensemble de la nature tourmentée de Lin McAdam.
Je serais plus proche de ce que disait fort justement Musselshell à propos de la manière qu'a Mann de le filmer, cette interrogation implicite qu'il pose, notamment quand il tourne sa caméra vers son regard désabusé, à la fin. On ressent cette fêlure, je trouve, dans le regard baissé, lassé et un peu honteux de Stewart (parce qu'il se sait un assassin, fratricide, et qu'il n'ose regarder en face à la fois son ami et la femme avec qui il pourrait, qui sait, refaire sa vie...). Son jeu colle parfaitement, il me semble, à la tonalité que Mann a voulu imprimer...
De même quand la violence explose, soudainement, après avoir été comme trop longtemps retenue, le visage de Stewart, où tout passe, traduit bien cette irruption...
Autant je serais d'accord avec old timer sur cette image un peu frêle, fragile et (quasi) comique de Stewart dans Femme ou démon par exemple (mais le rôle est effectivement écrit comme ça), autant je n'ai pas vraiment cette impression ici...
- Alec Longmire
- Convoyeur de bétail
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- Enregistré le : 05 janv. 2009 15:57
Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Oups ! un message a eu le temps de s'intercaller : je répondais bien sûr à la remarque de old timer concernant Stewart...
- musselshell
- Castor éclopé
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Alec, en ce qui concerne ses films antérieurs...essaie de voir La Vie est belle (Life is wonderful), de Capra en 47. Un film immense, qui n'a pas pris une ride. Qui vieilli et vieillira bien mieux que le film éponyme sorti il y a trois ou quatre ans...
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- Eager Beaver
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- Enregistré le : 20 août 2008 22:29
Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Pour revenir aux incohérences scénaristiques des deux pistoleros qui touchent une pièce en plein vol au début du film et mettent de longues minutes à s'entretuer, cela avait également était pris en compte par Mann.
Dans Positif n°94 de 1968 (cité dans le Western de patrick Brion, page 161), voilà ce que déclarait Mann: "ce que j'aime c'est le décor de la fin. lorsque j'ai fait mes repérages, j'ai été content de découvrir ces rochers. Les deux hommes ne pouvaient se battre sur un terrain plat. Ils étaient trop bons tireurs et le duel n'aurait duré que quinze secondes. Dans les rochers, au contraire, ils devaient se servir de tout leur corps et être extrêment prudents, beaucoup plus qu'à découvert. De plus, le duel devenait passionnant."
Dans Positif n°94 de 1968 (cité dans le Western de patrick Brion, page 161), voilà ce que déclarait Mann: "ce que j'aime c'est le décor de la fin. lorsque j'ai fait mes repérages, j'ai été content de découvrir ces rochers. Les deux hommes ne pouvaient se battre sur un terrain plat. Ils étaient trop bons tireurs et le duel n'aurait duré que quinze secondes. Dans les rochers, au contraire, ils devaient se servir de tout leur corps et être extrêment prudents, beaucoup plus qu'à découvert. De plus, le duel devenait passionnant."
Modifié en dernier par Eager Beaver le 10 juil. 2009 11:37, modifié 1 fois.
- Alec Longmire
- Convoyeur de bétail
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Ah ! je ne connaissais pas cette anecdote de Mann concernant la fin de son film ! Il avait donc pensé à tout, et tant mieux puisque cela nous a donné le superbe duel de la fin...
Cela dit, malgré le relief tourmenté et impressionnant des rochers de la fin, on a l'impression sur quelques plans que deux tireurs de la trempe qu'ils ont montrée dans le concours du début pourraient en découdre plus rapidement ; mais cela reste un détail : la scène est tout de même remarquablement filmée, pleines d'idées (les fameux ricochets) et il est vrai que les protagonistes se servent admirablement de leur corps. Je crois d'ailleurs que c'est également ce duel final qui fait pour moi de Winchester 73 un coup de coeur particulier.
Sinon pour ce qui est de La vie est belle de Capra, j'ai bien failli le voir grâce à l'admirable bibliothèque de Lyon, lorsque j'y étais, mais je ne me suis jamais décidé à l'emprunter : un regret de plus ! J'espère que j'aurai l'occasion de le voir un de ces jours... Merci du conseil en tout cas
Cela dit, malgré le relief tourmenté et impressionnant des rochers de la fin, on a l'impression sur quelques plans que deux tireurs de la trempe qu'ils ont montrée dans le concours du début pourraient en découdre plus rapidement ; mais cela reste un détail : la scène est tout de même remarquablement filmée, pleines d'idées (les fameux ricochets) et il est vrai que les protagonistes se servent admirablement de leur corps. Je crois d'ailleurs que c'est également ce duel final qui fait pour moi de Winchester 73 un coup de coeur particulier.
Sinon pour ce qui est de La vie est belle de Capra, j'ai bien failli le voir grâce à l'admirable bibliothèque de Lyon, lorsque j'y étais, mais je ne me suis jamais décidé à l'emprunter : un regret de plus ! J'espère que j'aurai l'occasion de le voir un de ces jours... Merci du conseil en tout cas
Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
S'il s'agit du film de Begnini "La vita e bella" , il est de 1997. Presque 13 ans.musselshell a écrit :Alec, en ce qui concerne ses films antérieurs...essaie de voir La Vie est belle (Life is wonderful), de Capra en 47. Un film immense, qui n'a pas pris une ride. Qui vieilli et vieillira bien mieux que le film éponyme sorti il y a trois ou quatre ans...
Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Si l'on compare "Winchester 73" aux deux premiers westerns de Mann , il peut sembler décevant.
Cette suite de scènes embrassant des situations et des personnages caractéristiques du western n'a pas l'ambition du propos de "Devil's doorway " ni la profondeur d'analyse de des personnages de "The furies".
Et pourtant , c'est un grand film ,par cette synthèse des thèmes du western classique ,le réalisateur produit une oeuvre passionnante pour l'amateur.
Nous sommes en terrain connu , il n'y a pas de surprises mais la virtuosité de Mann et le talent des interpretes génèrent un western de référence.Quand on sait qu'il est encore inférieur aux films suivants tournés avec James Stewart , on mesure l'étendue du talent d'Anthony Mann.
Mon seul reproche ,tout relatif, serait la schématisation des personnages surtout en regard des autres westerns du metteur en scène.Stewart ,sans etre fade, est encore loin des personnages autrement plus complexes qui l'attendent : le héros égoîste et antipathique de "The far country" (du moins dans la première partie du film) ou le Howard Kemp paranoiaque et pathétique de "The naked spur".
Le héros selon Mann est résolument à part dans le western , son aboutissement , Link Jones , l'homme de l'Ouest , personnage désenchanté mais lucide , ayant oublié son ancienne vie de tueur pour la retrouver brutalement , me parait etre le "westerner" ultime , en compagnie du Cole Thornton de Peckinpah et dans une moindre mesure du William Munny d'Eastwood.
Les autres personnages de "Winchester 73" ne sont pas trop developpés non plus ( faute de temps , puisqu'ils se succèdent dans l'histoire ).John Mc Intire dans son rôle de méchant attachant et vicieux sort du lot, on dirait qu'il s'entraine pour le personnage beaucoup plus abouti de Mr Gannon dans " The far country".
Le thème de la Winchester , probablement sponsorisé par le fabricant , est directement lié à la mythologie des armes de l'Ouest.Ce n'est pas le seul titre de western qui fait référence à une arme : " Springfield rifle ", " Colt 45 "," Shotgun "...et cela renvoie au fait incontestable que l'un des éléments qui ont fait le succes du western est bien la présence des armes à feu qui sous-tend les scènes d'action du genre.
Certains personnages sont indissociablement liés à leur arme : le fusil Winchester à chargeur réduit de Paul Newman dans "Hombre" ou le Colt Walker d'Eastwood dans "Josey Wales".
Et puis ,grace aux westerns, nous avons tous eu les pistolets en plastique de notre enfance.
Un western sans coups de feu , c'est encore plus rare qu'une bouteille de Whisky (pleine !) dans le désert.
A vrai dire , je ne connais qu'un seul western où les armes ne parlent pas :"Four faces west" avec Charles Bickford et Joel Mc Crea.
Avant de finir , je voudrais signaler , si cela n'a pas été fait , qu'un autre film formidable du duo Mann-Stewart vint de sortir en DVD : "Thunder bay" (Z 2), un film d'aventures touné à la même époque que le cycle de westerns qui nous interesse.
Là-dessus , bonne vacances à tous , amigos !
Cette suite de scènes embrassant des situations et des personnages caractéristiques du western n'a pas l'ambition du propos de "Devil's doorway " ni la profondeur d'analyse de des personnages de "The furies".
Et pourtant , c'est un grand film ,par cette synthèse des thèmes du western classique ,le réalisateur produit une oeuvre passionnante pour l'amateur.
Nous sommes en terrain connu , il n'y a pas de surprises mais la virtuosité de Mann et le talent des interpretes génèrent un western de référence.Quand on sait qu'il est encore inférieur aux films suivants tournés avec James Stewart , on mesure l'étendue du talent d'Anthony Mann.
Mon seul reproche ,tout relatif, serait la schématisation des personnages surtout en regard des autres westerns du metteur en scène.Stewart ,sans etre fade, est encore loin des personnages autrement plus complexes qui l'attendent : le héros égoîste et antipathique de "The far country" (du moins dans la première partie du film) ou le Howard Kemp paranoiaque et pathétique de "The naked spur".
Le héros selon Mann est résolument à part dans le western , son aboutissement , Link Jones , l'homme de l'Ouest , personnage désenchanté mais lucide , ayant oublié son ancienne vie de tueur pour la retrouver brutalement , me parait etre le "westerner" ultime , en compagnie du Cole Thornton de Peckinpah et dans une moindre mesure du William Munny d'Eastwood.
Les autres personnages de "Winchester 73" ne sont pas trop developpés non plus ( faute de temps , puisqu'ils se succèdent dans l'histoire ).John Mc Intire dans son rôle de méchant attachant et vicieux sort du lot, on dirait qu'il s'entraine pour le personnage beaucoup plus abouti de Mr Gannon dans " The far country".
Le thème de la Winchester , probablement sponsorisé par le fabricant , est directement lié à la mythologie des armes de l'Ouest.Ce n'est pas le seul titre de western qui fait référence à une arme : " Springfield rifle ", " Colt 45 "," Shotgun "...et cela renvoie au fait incontestable que l'un des éléments qui ont fait le succes du western est bien la présence des armes à feu qui sous-tend les scènes d'action du genre.
Certains personnages sont indissociablement liés à leur arme : le fusil Winchester à chargeur réduit de Paul Newman dans "Hombre" ou le Colt Walker d'Eastwood dans "Josey Wales".
Et puis ,grace aux westerns, nous avons tous eu les pistolets en plastique de notre enfance.
Un western sans coups de feu , c'est encore plus rare qu'une bouteille de Whisky (pleine !) dans le désert.
A vrai dire , je ne connais qu'un seul western où les armes ne parlent pas :"Four faces west" avec Charles Bickford et Joel Mc Crea.
Avant de finir , je voudrais signaler , si cela n'a pas été fait , qu'un autre film formidable du duo Mann-Stewart vint de sortir en DVD : "Thunder bay" (Z 2), un film d'aventures touné à la même époque que le cycle de westerns qui nous interesse.
Là-dessus , bonne vacances à tous , amigos !
- musselshell
- Castor éclopé
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Re: Winchester '73 - 1950 - Anthony Mann
Nom de dieu...L.. a écrit :S'il s'agit du film de Begnini "La vita e bella" , il est de 1997. Presque 13 ans.musselshell a écrit :Alec, en ce qui concerne ses films antérieurs...essaie de voir La Vie est belle (Life is wonderful), de Capra en 47. Un film immense, qui n'a pas pris une ride. Qui vieilli et vieillira bien mieux que le film éponyme sorti il y a trois ou quatre ans...
C'est beaucoup trop 255 caractères. Je renonce à apposer une signature.
Ah...c'est la limite haute...
Je renonce quand même. Je sais pas quoi dire, de toutes façons.
Ah...c'est la limite haute...
Je renonce quand même. Je sais pas quoi dire, de toutes façons.