Hum...
Pas trop d'accord avec des choses susdites...
Occulter du débat la représentation de la violence à propos de ce film, c'est occulter en grande partie la perception qu'il a eu par les spectateurs de l'époque ou plus proches de nous (moins aujourd'hui, la violence au cinéma étant désormais assez banalisée et ayant gagnée en réalisme parfois très sordide).
Film raté ? Oui, m'enfin pas tant que ça. C'est quand même un film dont on parle encore et qui est assez connu hors du cercle des westerners, et quand TF1 l'avait édité en VHS en 1998 en double version (VF et VOst, chose assez rare sur ce support) dans une définition remastérisée, ce n'est pas un hasard. Ceci dit, je suis d'accord, le film est inabouti et maladroit. D'autant que Nelson est bien moins doué que ses collègues d'alors, tous genres confondus, comme Scorsese, De Palma, Friedkin, Pakula, Pollack, Lumet... Et il manipule très mal au final cette violence qui, se voulant dénonciatrice, devient en fait une sorte de gimmick de mise en scène du genre "regardez comment je vais vous choquer avec mes images"... Il a fait mieux du coup avec le mésestimé
La Bataille de la vallée du diable, moins film à thèse mais pas neutre non plus.
Mais, il est intéressant à voir par bien des aspects, et ce pour son contenu comme pour son histoire. C'est l'un des représentants de ce qu'on a appelé le nouvel Hollywood des années fin 1960-1970, à l'époque où l'on cassait les codes du film à papa des années 1950 et avant. Le contexte historique au tournage a aussi multiplié son impact (impact depuis moindre, sauf si on remet le film dans ce contexte à sa vision, ce qui est pour moi indissociable si on veut en assimiler la démarche) : la (pas soi-disante) violence du film renvoyait à l'actualité, le sang s'étant invité au JT à la TV du salon (l'armée américaine ne réitérera pas ses erreurs après le Vietnam, et canalisera nettement plus les images que les journalistes prendront des conflits, et ça s'est clairement vu depuis le premier conflit du Golfe).
On peut comparer le film avec le
Fureur Apache d'Aldrich mais le discours ne tient pas vraiment, car ce film a aussi ses contempteurs qui lui reprochent aussi sa violence et son discours. Et je ne vois pas l'un comme le contraire de l'autre. Le distinguo entre les deux se faisant finalement via les goûts de chacun, Aldrich étant effectivement d'une autre trempe que Nelson comme réalisateur.
Et
Soldat bleu a du fond, bien plus qu'un gros paquet de westerns dans lesquels un héros bien héroïque combat des méchants bien méchants pour sauver des gentils bien gentils pour les yeux d'une belle très potiche...
Quant à Tarantino, ben non, je n'ai jamais dit que c'est pareil que
Soldat bleu, j'ai juste que la perception était comparable. Bien sûr que le public est différent, puisque les tabous et les censures au cinéma sont presque tous tombés, et justement grâce à des films tels que celui de Nelson. Et c'est très injuste, en plus d'être faux, de résumer le public de Tarantino à des geeks gavés de jeux vidéos. Bien que pas très client de ce festival, le jury de Cannes qui lui a offert la Palme d'Or en 1994 ne m'a pas paru spécialement accro aux consoles jeux, à moins que Clint Eastwood, Catherine Deneuve ou le vénérable Shin Sang-ok se soient fait des parties effrénées de
Donkey Kong sur la Super Nitendo...
