Dallas, Ville Frontière (Dallas, 1950) de Stuart Heisler
WARNERAvec Gary Cooper, Ruth Roman, Steve Cochran, Raymond Massey, Reed Hadley, Barbara Payton, Leif Erickson
Scénario : John Twist
Musique : Max Steiner
Photographie : Ernest Haller
Une production Anthony Veiller pour la WarnerSortie USA : 30 décembre 1950Après John Wayne en 1949, c'est à Gary Cooper que revient l'honneur de clôturer cette copieuse année 1950 en matière de western. Si l’année westernienne fut riche qualitativement parlant, ce n’est par contre pas du fait de la Warner qui avait commencé par nous livrer en pâture l’insipide
Montana et qui, après quatre ou cinq autres westerns guère plus réussis, à peine dignes de mauvaises séries B, nous balance en guise de cadeau de fin d'année le médiocre
Dallas que voici. Warner est le studio nous ayant livré les plus mauvais westerns de ces derniers année alors que dans le même temps, la MGM, Universal, la 20th Century Fox et la Paramount continuaient à soigner les leurs afin qu’aussi bien les amateurs d’action que de bonnes intrigues et (ou) de ‘psychologie’ en aient pour leur argent, faisant attention à ce que les scénarios ne soient pas bourrés de clichés jusqu’à la gueule comme dans tous les plus récents produits par la Warner. Etonnant revirement de situation quand on sait que ce studio fut au contraire le plus ‘progressiste’ esthétiquement et surtout thématiquement parlant dès le début des années 30. Mais gageons qu’il ne s’agit que d’une mauvaise passe !


La Guerre Civile vient de se terminer. A Dallas, en l’absence d’un homme de loi, les ranchers sont terrorisés par les frères Marlow, Will (Raymond Massey) et Bryant (Steve Cochran). Le propriétaire Felipe Robles (Antonio Moreno) les prévient qu’il vient de demander à ce qu’un nouveau shérif soit nommé et les informe que ce dernier est en route. Il s’agit de Martin Weatherby (Leif Erickson), un pied tendre venant du Nord, même pas capable de tirer au pistolet. Sur son chemin, il assiste au duel qui oppose Wild Bill Hickock (Reed Hadley) à Blayde Hollister (Gary Cooper) qui se termine par la mort de ce dernier, ancien colonel de l’armée sudiste recherché par la loi. Le futur Marshall se rend vite compte qu’il s’agissait d’une mascarade pour faire passer Hollister pour mort afin que cessent les poursuites lançées à son encontre. Il souhaite surtout que les frères Marlow qui, ne le connaissant pas de vue, le croient décédé pour mieux aller les prendre par surprise ; en effet, nous ne savons pas encore ce qu’ils lui ont fait mais Hollister semble n’avoir qu’une seule idée en tête, se venger d’eux. Pour se faire, ayant entendu dire que le shérif se rendait mettre de l’ordre à Dallas (là où se trouvent précisément ses ‘ennemis), il décide d’échanger son identité avec celle de l’homme de loi. Ce dernier avoue à Hollister qu’il avait accepté ce rôle dans le seul but d’impressionner sa fiancée, la fille de l'éleveur de bétail Felipe Robles, Tonia (Ruth Roman). Autant dire que, contre toute une bande de renégats prêts à tout, les deux hommes vont avoir fort à faire…

Stuart Heisler à la baguette, Gary Copper de l’autre côté de la caméra ; certainement une soirée sympathique en perspective ! Avec en prime le Technicolor, il devrait au moins s’avérer aussi agréable que la précédente collaboration entre les deux hommes, le divertissant
Le Grand Bill (Along Came Jones), une des rares incursions réussies de la comédie parodique légère dans le western. Mais voilà que le générique se lance sur une musique de Max Steiner qui ne rappelle en rien les grandes heures du fameux compositeur de
King Kong,
Autant en emporte le vent ou
Casablanca. Mauvais signe ce manque d’inspiration du musicien, apparemment peu concerné par ce western de série ? Mais ne vendons pas la peau de l’ours…
Dallas débute en effet plutôt bien nous plongeant directement dans le vif du sujet par une séquence d’action de vol de bétail assez bien enlevée. S’ensuit dans la foulée un duel au pistolet entre le célèbre Wild Bill Hicock et Reb Hollister, le personnage d’ancien officier Sudiste recherché pour cause de rébellion, joué par Gary Cooper. Tout ceci s’avère n’être qu’une mascarade destinée à simuler la mort de ce dernier afin qu’il soit tranquille pour régler une vengeance personnelle envers les frères Marlow, responsables du massacre de sa famille durant la Guerre de Sécession, désormais établis à Dallas pour essayer de s’y approprier toutes les terres et régner en maîtres sur la région. Mascarade encore lorsque Reb décide d’échanger son identité avec un Marshall ‘pied tendre’ venu au Texas dans le seul but d’impressionner sa fiancée ! Voici donc Gary Cooper (très à l'aise une fois de plus lorsqu'il s'agit de jouer les 'faux' benêts) en partance pour Dallas, affublé d’un costume de dandy qui le rend assez ridicule, pour y nettoyer la ville de ses mauvais éléments.


Tout démarrait donc pour le mieux, sur une tonalité particulière, l’humour et la cocasserie étant parfaitement intégrés dans une intrigue à priori dramatique. Et puis patatras ! Le scénario de John Twist (pourtant collaborateur sur le superbe script de
La Fille du désert - Colorado Territory de Raoul Walsh), certes toujours aussi rocambolesque, devient inutilement compliquée, harmonisant assez mal l’humour et le sérieux, l’action et les séquences bavardes et statiques. Tout ceci manque alors d’homogénéité et devient mal équilibré. A partir du moment où le sérieux prend le pas sur l’humour (qui se volatilise d'ailleurs sans crier gare), on commence sérieusement à se désintéresser de l’histoire, des personnages et de ce qui peut leur arriver d’autant plus que le pauvre Stuart Heisler n’arrive jamais à faire décoller ni à donner du souffle à sa mise en scène bien terne (tout comme l'interprétation d'ensemble à l'exception de Gary Cooper).


Bref, ça bouge beaucoup, le Technicolor de Ernest Haller met magnifiquement en valeur les beaux costumes confectionnés pour Gary Cooper (le gilet vert à frange lui sied à ravir) et la charmante Ruth Roman ; nous avons même droit à quelques séquences agréables et détails pittoresques (la façon qu’à Steve Cochran de porter sa ceinture de revolvers) mais l’ennui vient s’installer assez rapidement pour ne plus nous quitter avant le final assez efficace se déroulant dans un saloon plongé dans le noir. Western de série assez laborieux réservé aux seuls aficionados du genre et (ou) de Gary Cooper. Dommage car nous trouvions au départ au sein du scénario et des dialogues pas mal d’éléments intéressants à nous mettre sous la dent concernant la situation de l’après Guerre de Sécession. Mais ce n'est pas bien grave car de nombreux films ont déjà abordés cette période historique avec force détails passionnants. Un coup pour rien concernant le dernier western de l'année. Mais 1951 va débuter sous les meilleurs augures !