W.S. Hart et l’année 1924
Par Marc
Au sein des plus prestigieuses filmographies apparait parfois un film maudit.
Une œuvre oubliée, mal reçue, quelquefois méprisée.
C’est, par exemple, Der Verlorene pour Peter Lorre , ou An enemy of the People pour Steve Mac Queen.
C’est un film souvent tourné en fin de carrière, quand la star veut porter un projet qui lui tient à cœur,
et qui, pour diverses raisons, est un échec.
Pas forcément artistique d’ailleurs, mais le succès et la reconnaissance ne sont pas au rendez-vous.
Pour W.S. Hart, ce film maudit fut sans doute Singer Jim McKee, sorti en 1924 , une année noire pour l’acteur.
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Coeur de brigand (Singer Jim McKee)
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Hart, comme souvent, est à l’origine de l’intrigue , qu’il scénarise avec son collaborateur habituel ,
le prolifique J.G Hawks. Il en confie la mise en scène à Clifford S. Smith, le réalisateur de Wild Bill Hickok.
L’acteur interprète ici un personnage tout à fait inhabituel pour lui.
A l’opposé de la plupart de ses rôles, Jim McKee n’a rien d’héroïque. C’est un homme simple, qui n’aspire
qu’à vivre tranquille, en harmonie avec son environnement et son entourage.
On peut voir dans cette histoire un souhait ou plutôt un regret de W.S. Hart qui, bien que devenu riche
et célèbre, n’a jamais caché son amertume d’être passé à côté d’une vie personnelle et familiale heureuse.
Singer Jim McKee porte un peu les rêves brisés de Hart.
Le personnage est ici balloté par le destin et les circonstances. Il aspire à un bonheur simple, mais celui-ci
lui échappe.
Une belle idée qui aurait pu donner un grand film.
Ce ne fut pas le cas. La faute à un scénario bien trop maladroit et approximatif, à une réalisation peu
inspirée, et, comme trop souvent chez Hart , à un sentimentalisme excessif.
Buck Holden désespère de leurs stériles recherches
Photo : The Complete Films of William S. Hart. Diane Kaiser Koszarski
Singer Jim McKee et son ami Buck exploitent une mine dont le filon s’épuise. Buck est le père célibataire
d’un bébé, la petite Mary , élevée par les deux hommes.
Pour éviter la misère, Buck décide de dévaliser une diligence. Jim est son complice. C’est un échec, les
fuyards sont pourchassés, Buck est abattu. Jim se réfugie dans les montagnes avec Mary.
Ils y restent des années. Jim finit par comprendre que la vie qu’ils mènent ne peut convenir à la jeune fille
qu’est devenue Mary.
Photo : The Complete Films of William S. Hart. Diane Kaiser Koszarski
Celle-ci est humiliée lors d’un bal de village en raison de la pauvreté de ses vêtements. Pour trouver de
l’argent, Jim décide de redevenir un voleur. Il remet la somme dérobée à Mary, mais les billets ont été
marqués et la jeune fille est arrêtée lorsqu’elle se rend à la banque.
Le fils du banquier sûr de l’impunité que lui confère sa richesse agresse Mary. Jim intervient à temps pour
éviter le pire, mais il est lui-même arrêté. Le banquier n’est autre que l’ancien shérif qui a tué Buck. Il
veut désormais faire condamner lourdement l’homme qui lui a échappé autrefois.
Après plusieurs années de prison, Jim retourne dans les montagnes pour s’isoler du monde.
Photo : The Complete Films of William S. Hart. Diane Kaiser Koszarski
C’est là que Mary vient le retrouver, pleine d’un amour qui n’a plus rien de filial.
A la lecture du synopsis, on voit que l’histoire, assez bancale , manque de crédibilité.
La vie rousseauiste menée par Jim et Mary est caractérisée par bon nombre de clichés : beauté de la
nature-refuge, pittoresques animaux adoptés (dont un perroquet ! ), …
L’amour entre un Jim de 60 ans et sa fille adoptive de 20 ans laisse perplexe.
La sentimentalité affichée dévaste le film, lequel montre toutefois de belles séquences.
La scène où Mary est moquée en raison de son propre accoutrement est vraiment poignante.
Celle où Jim menace du poing les véhicules de riches touristes venus toiser les pauvres hères vivant dans
les montagnes est puissante.
Les séquences d’action ne sont pas en reste, avec l’une des plus belles cascades de toute la filmographie
de Hart : le saut spectaculaire dans un ravin de Jim et sa monture. Hart et son fidèle Fritz ont été doublés
pour l’occasion, l’acteur par un cascadeur et son cheval par …un engin mécanique.
Le film est aussi une critique du pouvoir de l’argent : les banquiers sont ici détestables, et les riches citadins
qui viennent se prélasser dans l’Ouest en affichant leur richesse et leur mépris des autochtones ne le sont
pas moins. Hart règle ses comptes.
Le public a sans doute été déconcerté par le personnage que lui proposait ici W.S.Hart : un individu au
comportement parfois craintif et maladroit (il se dissimule sous une table pour échapper à ses poursuivants,
sa désastreuse tentative pour s’évader de la prison s’achève dans le ridicule,…).
Photo : The Complete Films of William S. Hart. Diane Kaiser Koszarski
Le film fut un échec commercial et critique. Adolph Zukor, le producteur-distributeur fut effaré à la vision
du film, et en limita la publicité.
La direction du Metropolitan Theater de Los Angeles, un temple où les films de hart étaient projetés durant
des semaines, déprogramma Singer Jim McKee au bout de deux jours.
Zukor, fort mécontent, demanda à rencontrer Hart pour redéfinir les termes de leur partenariat.
Cette réunion sonna le glas de la relation professionnelle des deux hommes.
Hart refusa l’exigence de son producteur qui revendiquait la validation des scénarios avant tournage.
L’acteur, privé désormais de partenaire financier et de distributeur se senti plus que jamais rejeté par
Hollywood. Son ressentiment fut immense.
En privé, il déclara à ses amis «The jews crucified me» (cité par Ronald L. Davis dans son livre W.S.Hart :
Projecting the American West), adoptant ainsi une position christique pour souligner incompréhension
et trahison.
Il se retira dans son ranch de Newhall et se consacra à la modernisation et à l’agrandissement de sa
résidence, loin du cinéma et de ses turpitudes.
Si la carrière de W.S.Hart s’était achevée en 1924, on aurait pu considérer qu’il avait raté sa sortie.
Mais, au cours de l’été de cette même année, Harry Carey, lui aussi fin connaisseur de l’histoire de l’Ouest,
vint rendre visite à son ami Hart. Au cours d’une discussion passionnée, les deux hommes évoquèrent
longuement le fameux Cherokee Land Strip de 1889, dernier épisode de l’épopée westernienne.
Et tout changea pour W.S.Hart …
Singer Jim McKee est vraiment un film maudit. En dehors des rares collectionneurs privés qui possèdent
une ( très mauvaise ! ) copie du métrage , il est quasiment impossible à voir.
L’unique copie qui était visible par le public était assez régulièrement projetée par le Museum of Modern
Art de New York. Mais en 1983, la direction du musée annonça avoir mis au rebut trois des sept bobines
du film, irrémédiablement détériorées. Les projections furent abandonnées.
Les biographes de W.S.Hart ne sont pas tendres avec le film :
« Peut-être le pire film tourné par W.S.Hart » R.L. Davis
« Un film absurde à l’intrigue incohérente » W.K. Everson
Diane Kaiser Koszarski est plus indulgente, mais elle évoque tout de même : « Un dénouement
quasiment incestueux »
Ont-ils raison ?
Sorties des films de William S. Hart en 1924 :
Singer Jim McKee (mars) réalisation Clifford S.Smith.
Ken Maynard (1895 – 1973)
Ken Maynard a toujours été présenté comme un artiste de cirque, un vétéran
de la première guerre Mondiale, un champion de rodéo, né au Texas.
A dire vrai, il n'en était rien, né en Indiana, ou il a passé son enfance et il n'a
jamais gagné aucun championnat de rodéo. On ignore comment il est devenu
un bon cavalier, le fait est qu'il en était un très bon. Un critique a écrit qu'il
est « beau » et qu'il « monte si bien à cheval que ses exploits extraordinaires
nous paraissent d'une grande simplicité »
Ken Meynard était l'une des personnalités les plus détestées de la profession,
malgré cela il jouissait d'un grand succès auprès du public populaire. Au sommet
de sa popularité, avec son célèbre cheval palomino Tarzan, il était devenu très
riche, considéré comme « un âne arrogant » il dilapidait sa fortune avec des
femmes, la boisson, les voitures de luxe et il avait même son propre avion.
Pourtant, il aimait déclarer à qui voulait l'entendre « Je n'ai jamais bu ni fumé
dans un film ».
A l'opposé de Hart ou Carey, cowboys plutôt sombres et austères dans leurs apparences,
Maynard portait un chapeau blanc aux larges bords, des chemises fantaisie et des
bottes pailletées.
En 1924, il a tourné son premier western $50,000 Reward suivi de The Grey Vulture,
après avoir signé chez J. Charles Davis Productions, studio indépendant qui produisait
des westerns à petit budget. De 1926 à 1929 Ken Maynard tourne une vingtaine de
westerns avec First National Pictures de Fox. On citera ici : The Demon Rider de 1925;
La selle du diable; Les compagnons de la mort de 1927, et The Glorious Trail de 1928.
Voir aussi sur le forum : viewtopic.php?f=30&t=8870#p81870
Ken Maynard et Albert S. Rogell; à droite Ken Maynard et Tarzan :
.
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$50,000 Reward
_______________________________________ Tex un cowboy du Texas, arrivé à Belmont dans le Montana pour enregistrer le titre d' un terrain reçu en héritage,
tombe sur un banquier et des hommes d'affaires peu scrupuleux. Ceux-ci ont de grands projets pour ce terrain,
comme la construction d'un barrage. Ils sont donc bien décidés à récupérer cette propriété. Tex réussit à leur
échapper, a déjouer leurs plans , et rencontre Caroline responsable des travaux. Au final Tex touche 5 millions
de dollars et repart pour le Texas avec Caroline.
Fiche technique :
Réalisateur : Clifford S. Elfelt
Scénario : Frank Howard Clark
Image : Bert Longenecker
Production : Clifford S. Elfelt Productions, J. Charles Davis Productions
Durée : 55 min - 1.508,75 m (5 bobines)
Lieu de tournage : Mulholland Dam, Hollywood Hills, California
Distribution : Ken Maynard (Tex Sherwood), Esther Ralston (Carolyn Jordan), Bert Lindley
(Anthony Jordan ), Edward Peil Sr. (Buck Scofield), Lillian Leighton (Mrs. Miller),Charles Newton (Pa Miller),
Frank Whitson (Asa Holman) ...
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Al Hoxie (1901 – 1982)
Al Hoxie avait du sang indien par sa mère qui était d'ascendance Nez Percé.
Frère cadet du cowboy star Jack Hoxie, il était de 16 ans plus jeune.
Lorsque le succès a souri à Jack, Al, âgé de 19 ans l'a rejoint à Los Angeles et
a rapidement travaillé comme cascadeur, servant de doublure à son frère et
figurant dans certains films, dont L'usurpateur, ou Days of '49; Ce n'est
qu'en 1925 dans Buried Gold, qu'il obtient son premier rôle principal. Suivront,
Unseen Enemies et The Road Agent, ce dernier est le quatrième
des huit westerns produit par Morris R.Schlank et dirigé par J.P.McGowan,
la même année.
Ses westerns-B, souvent produits par les studios appelés Poverty Row, même
en exploitant le nom de son frère Jack, n'ont jamais obtenu le succès escompté.
Puis, avec l'arrivée du cinéma sonore, Al comprend que sa carrière d'acteur n'ira
pas au-delà . Il abandonne donc le cinéma et rentre dans l'Idaho.
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L'usurpateur (The Back Trail)
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Un cow-boy devenu amnésique suite à ses blessures de guerre, est manipulé par un gang . Lui faisant croire
qu'il est un criminel recherché par la police, Ie gang le pousse à aller contre la volonté de son père et à prendre
la succession de sa sœur adoptive. Machination qui va permettre aux bandits de s'approprier de tous ses biens...
Fiche technique :
Réalisateur : George Marshall, Clifford Smith
Scénario : Isadore Bernstein, Walter J. Coburn, George Hoag
Image : Harry Neumann
Production : Universal Pictures
Durée : 1.711,45 m (5 bobines)
Distribution : Jack Hoxie (Jeff Prouty), Al Hoxie (le clochard), Eugenia Gilbert (Ardis Andrews),
Claude Peyton (‘Gentleman’ Harry King), William Berke (Jim Lawton), William McCall (Juge JeffersonTalent),
Buck Connors (Shorty), Pat Harmon (Curry)
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Days of ’49
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"Série de 15 chapitres qui suit de manière fantaisiste, l'expédition du général Fremont en Californie
espagnole pour acquérir celle-ci pour les États-Unis, et la découverte de l'or à Sutter's Mill". IMDb
"Le film raconte une partie de l'histoire de la Californie à ses débuts : une période de chevalerie, d'intrigue et
de romance. Dans les années 1840, Neva Gerber (Sierra Sutter) une fille simple, et son père Charles
Brinley (John Sutter) possèdent des terres, qui feront partie plus tard de l'état de Californie. Mais, John Sutter
tombe sous le charme de Ruth Royce (Arabella Ryan) qui est liée à Wilbur McGaugh (Marsdon). Tous les deux
complotent pour usurper le territoire de la Californie et créer un empire à l'Ouest. Neva elle, est amoureuse
de l'aventurier romantique Edmund Cobb (Cal Coleman); ensemble ils écriront un chapitre de l'histoire de
la Californie." Wikipédia
Fiche technique :
Réalisateur : Jacques Jaccard
Scénario : Jay Marchant , Ben F. Wilson d'après l' histoire de Karl R. Coolidge
Production : Wild West Productions , Arrow Film Corporation
Durée : 9 000 m (30 bobines) (15 episodes)
Photo : Wikimedia Commons
Distribution : Neva Gerber (Sierra Sutter), Edmund Cobb (Cal Coleman), Charles Brinley (John Sutter),
Wilbur McGaugh (Marsdon), Ruth Royce (Arabella Ryan), Clark B. Coffey (Judge William T. Coleman), Al Hoxie
(Indian chef), Yakima Canutt, Elias Bullock
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Trigger Fingers
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Photo : Wikimedia Commons
de "The Black Hawk" qui terrorise la campagne, et de neutraliser leur chef. Après diverses scènes
de poursuites et de combat Steele arrive à ses fins...
film probablement perdu
Fiche technique :
Réalisateur : B. Reeves Eason
Scénario : William Berke (as William Lester),
Image : Walter L. Griffin
Production : Independent Pictures
Durée : 1 455,45 m (5 bobines)
Distribution : Bob Custer (Sergent Steele), George Field (Doctor Deering), Margaret Landis
(Ruth Deering), Bill Dyer (Sheriff Mackhart), Max Asher (Mackhart’s deputy), Joe Bennett (Bob Murtison),
Fontaine La Rue (Wetona)
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Flashing Spurs
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Lors d'une visite à New York, le Sergent Ranger Stuart se retrouve mêlé à une bagarre entre deux hommes
armés. Il s'enfuit, se cache dans une chambre d'hôtel occupée par Rena Holden, séduisante jeune femme.
Rena disparaît mystérieusement, Stuart fouille parmi ses affaires et trouve des preuves indiquant qu'elle
fait partie du gang Clammert, qui prévoit de voler le coffre-fort du père de Rena, John Holden. Stuart se
dirige vers la mine Holden, où il voit Ruth, la sœur jumelle de Rena. Stuart confond les deux jeunes femmes
et accuse publiquement Ruth de vol. Stuart est capturé par les hommes de Clammert. Il leur échappe,
retrouve Rena, monte à la cabane de Clammert et sauve Ruth. Rena blessée dans la lutte, explique à
Stuart que Clammert l'a faisait chanter. Stuart lui pardonne, et Rena consent à épouser le ranger .
film considéré perdu
Fiche technique :
Réalisateur : B. Reeves Eason
Scénario : William Berke (William Lester)
Image : Walter L. Griffin
Production : Independent Pictures
Durée : 1.544,75 m (5 bobines)
Distribution : Raymond Glenn / Bob Custer (Sergent Stuart, Rangers), Edward Coxen
(Steve Clammert, "The Spider"), Marguerite Clayton (Ruth Holden/Rena Holden), Joe Bennett
(Butch Frazier), William Hayes (Scarbee), William Malan (John Holden), Andy Waldron
(Flynn), Park Frame (Bill Carbee)
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A suivre...