Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

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Eager Beaver
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Eager Beaver »

Ca y est, le coin au tour du feu prend forme. L'introduction historique, littéraire et géographique posée avec talents, j'attendais avec impatience le vif du sujet.
Je sentais Jean Louis et Musselshell piaffer dans leur coin, qu'ils en avaient encore plein en stock, au travers de leur attitude trop policée, lorsqu'ils tendaient la perche espérant que quelqu'un la relève, pour être totalement détachés. En se limitant au constat liberté filmique/réalité historique, chacun a fait suffisamment durer les préliminaires.
Longway a montré la voie, il y a deux histoires dans le film (pour une fois que le titre français apporte un plus, ne le laissons pas passer).
J'avais tenté, sans doute trop tôt, d'aller du côté du crépuscule et de la mauvaise conscience melvillienne.
Enfin, c'est parti. Malheureusement n'ayant pas le film sous le coude, je ne puis pertinemment pas rentrer dans le bois dur et dois me contenter de mes souvenirs. Allez y Jean Louis et Musselshell, je me languis d'avance de votre joute et de toutes les efflorescences qui en jailliront. Avis aux amateurs!
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Longway
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Longway »

Parlons un peu de ce fameux convoi.
Cette idée du bateau remplaçant le traditionnel chariot afin de transporter les peaux de castors, est à la fois quelque chose d'original et fortement improbable à la fois, mais dans les deux cas suréaliste.

Original car le spectateur qui découvre le film est à cent lieues d'imaginer lors du générique, voir débusquer un bateau au milieu de la nature. Tout au plus peut-il penser à une sorte de procession dont le mat, qui seul apparait, ressemble plus à une croix chrétienne qu'autre chose. La surprise est de taille, le public ne peut que se réjouir et aussi commencer à se poser des questions sur un tel prologue annonçant un western inhabituel.

Improbable oui !... Si on replace cela dans le contexte du réalisme. Comment un groupe de trappeurs revenant d'une chasse prolifique au pied des Rocheuses, peut-il s'abandonner à construire un bateau au milieu des bois, loin de toute voie d'eau naviguable, pour ensuite le trainer péniblement à travers montagnes et forëts, au risque d'être complètement détruit par inadvertance ou maladresse tout au long du parcours.
La sagesse et la lucidité aurait voulu qu'un simple chariot baché abritant la précieuse marchandise, eusse suffit à rallier la rivière ( Missouri ? )
Une fois arrivé sur place la construction du bateau devenait évidente puisque proche du cours d'eau. Du temps de gagné et la possibilité de choisir l'endroit qui convenait le mieux à l'embarquement.
Rien n'est vraiment dit sur l'origine de cette embarcation. Les trappeurs l'ont-ils réellement construit sur leur lieu de chasse ? Ou bien était-elle déja en service au moment du départ pour les Rocheuses. Ils auraient donc remontés un affluent du Missouri ( Platte, Yellowstone ? ) jusqu'à ce que celui ci ne devienne plus naviguable, pour ensuite hisser le bateau et lui faire traverser des centaines de Kilomètres, tout cela au travers de contrées dangereuses et inexplorées, au lieu de le laisser tout simplement amarré afin de pouvoir le récupérer une fois la chasse terminée, et ainsi redescendre la rivière tranquillement en sens inverse. Non vraiment ils se sont bien compliqué la vie, alors que des solutions plus simple existaient.
Autre éventualité, Zachary Bass et le capitaine Henry étant des marins, ils auraient pu venir par le Pacifique, construire ou acheter un bateau pour remonter la Columbia puis la Snake, et ensuite trainer celui ci à terre pour rejoindre le Missouri.

Suréaliste enfin, ce bateau est un symbole religieux. C'est la vanité de l'être humain à vouloir défier les étendues sauvages par la religion, une sorte d'arche avec un mat en forme de croix, comme pour mieux imposer la force divine dans des contrées où l'homme civilisé n'a jamais mis les pieds, une mission sprirituelle au coeur d'une nature vierge que l'homme veut évangéliser, dompter, soumettre !
Mais cet arche contrairement à celui de Noé, ne transporte pas la vie mais plutôt la mort... mêlée à la cupidité de l'être humain. Ces peaux d'animaux qui composent la cargaison annoncent les futurs désastres écologiques. L'homme règnant en maitre dans ces nouveaux horizons, créant de nouvelles civilisations plus destructives que constructives, avec la bénédiction divine qu'il s'est donné lui même, mais au détriment de l'oeuvre véritable de la création d'origine, celle qui l'a fait et l'a vu naitre. Zachary Bass, un homme en conflit avec Dieu, à la recherche de lui même, va par la force du destin être obligé de repartir de zéro, revivre une naissance aussi bien physique que spirituelle, avec pour résultat une transformation totale de sa personne. Lui seul sera le grand bénéficiaire de cette expédition.
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musselshell
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par musselshell »

Le navire tiré par les hommes est plus qu'improbable! Il y a là une pure volonté de mise en scène, un jeu sur l'image et tous les symboles inhérents... plus d'ailleurs qu'une réelle originalité scénaristique.
Jusque dans les années 1830, seuls des keelboats (fonds plats) remontaient le Missouri...Lewis et Clark ont utilisé le leur jusqu'en pays Mandan (la Grande Boucle), pour le renvoyer ensuite à Saint Louis avant d'adopter les bullboats de la tribu, plus leur deux grandes pirogues (White Pirogue, Red Pirogue...termes retenus par la postérité),"cachées" à la hauteur des Three Forks avant d'attaquer les montagnes. Ce fut alors à pieds, à cheval (à partir des Flatheads, puis chez les Nez Perçés)), puis en "dugout canoes" jusqu'au Pacifique.
Pendant toute la période historique de la traite des fourrures (grosso modo de 1807 à 1840), jamais aucun navire semblable à celui du film de Sarafian ne s'est retrouvé tiré par des trappeurs en pleine montagne! Pour une raison ultra simple: le castor se trouvant en altitude, il aurait fallu y emmener le navire pour le charger...plus toutes les raisons possibles et imaginables qui font que de toutes façons, c'est invraisemblable. Ce que Sarafian savait de toute évidence...Alors pourquoi ce choix, sinon pour souligner la dimension symbolique, le rapport à Melville, voire le clin-d'oeil à Huston/Achab...Le rapport à l'océan, aussi, d'où viennent Bass et Henry...et on retrouve le symbolique (le danger, l'incommensurable, l'inconnu...mais aussi la matrice, le renouvellement, la régénérescence...).
C'est beaucoup trop 255 caractères. Je renonce à apposer une signature.
Ah...c'est la limite haute...
Je renonce quand même. Je sais pas quoi dire, de toutes façons.
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Jicarilla
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Jicarilla »

musselshell a écrit : Jusque dans les années 1830, seuls des keelboats (fonds plats) remontaient le Missouri...Lewis et Clark ont utilisé le leur jusqu'en pays Mandan (la Grande Boucle), pour le renvoyer ensuite à Saint Louis avant d'adopter les bullboats de la tribu, plus leur deux grandes pirogues (White Pirogue, Red Pirogue...termes retenus par la postérité).
:lol: :lol: Je suis vos débats instructifs :applaudis_6: :applaudis_6: ,je mets mon grain de sel .... :lol: oui mais du sérieux ...:sm32:
:beer1: Une réplique des grandes pirogues à FORTUNATE CAMP de l'expédition de LEWIS et CLARK ,mais bon rien a voir avec le sujet .....

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PARTI VERS D'AUTRES ESPACES Image
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Jean-Louis
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Jean-Louis »

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Cette scène de l'accouchement de l'Indienne, tout aussi puissante que celle de Little Big Man l'année précédente, fait partie
des séquences fortes qui jalonnent le parcours de Zachary Bass, c'est à ce moment là qu'il réalise qu'en refusant d'accepter
son fils il passe à côté du véritable sens de la Vie.

Le portage du bateau, à mon humble avis, symbolise les lourdes contraintes de la société, de la hiérarchie, le poids de la religion.

Bass en renaissant s'affranchit de tout ça, il n'est pas seul à se libérer, son retour exemplaire parmi les siens fait que ses anciens compagnons aussi s'affranchissent, ils lui emboîtent le pas, même Captain Henry.
:)
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Alec Longmire
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Alec Longmire »

Pour une fois que je peux être en phase entre l'analyse qui est faite ici et mes séances personnelles, je ne vais pas louper ça ! J'ai regardé hier, bien consciencieusement, le convoi sauvage , et mes impressions sont assez mitigées.

En fait, si je suis d'accord avec les symboles qui ont (brillamment d'ailleurs) été évoqués ici, notamment le bateau et le rapport à la religion, et même si le film ne manque pas de force pour montrer le retour à l'animalité de Bass et sa renaissance, je trouve qu'il y a tout de même un certain manque de rythme (comme le signalait Vin au début).
Je ne m'y suis pas vraiment ennuyé, il est vrai que c'est très bien filmé (et pourtant c'est quelque chose que je remarque assez peu), comme je le disais le propos est fort, mais l'ensemble est assez lent, et je trouve que ce manque de rythme nuit à l'ensemble.

Et en même temps, je comprends que cette allure lancinante soit adaptée à ce que le film veut montrer : la renaissance justement, comment un homme peut se reconstruire à la fois physiquement, mentalement et jusqu'à sa foi ou sa compréhension du monde qui s'en trouve modifiée...
Sûrement que le Sarafian devait prendre son temps pour montrer tout ça, simplement je crois que je n'ai pas réellement accroché au résultat final.
Mais peut-être que le film gagne à être revu, quand on s'attend à ce qui est tout de même, comme vous le disiez plus haut, un western très inhabituel...
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Alec Longmire
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Alec Longmire »

Juste un petit post scriptum pour un détail qui m'a étonné : dans la version française que j'ai vue hier, j'ai remarqué à la fin du film que l'une des voix est celle de... Patrick Dewaere !
J'avoue que j'ai été surpris de voir ça ; quelqu'un sait-il de quel personnage il s'agit ? (en plus, il n'y a pas beaucoup de dialogues dans le film, c'est le moins qu'on puisse dire, mais sa voix ne m'a pas du tout sauté aux oreilles !)
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Longway
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Longway »

Alec Longmire a écrit :Juste un petit post scriptum pour un détail qui m'a étonné : dans la version française que j'ai vue hier, j'ai remarqué à la fin du film que l'une des voix est celle de... Patrick Dewaere !
J'avoue que j'ai été surpris de voir ça ; quelqu'un sait-il de quel personnage il s'agit ? (en plus, il n'y a pas beaucoup de dialogues dans le film, c'est le moins qu'on puisse dire, mais sa voix ne m'a pas du tout sauté aux oreilles !)
Oui j'ai la même version française, celle d'origine diffusée en salle avec le titre français. Le générique final indique effectivement les acteurs français qui doublent les acteurs américains.
Je me suis également posé la question, à savoir quel personnage pouvait bien doubler Patrick Dewaere. Je suppose ( je n'en suis pas certain ) que c'est à l'acteur Dennis waterman ( Jamie Lowrie ) que Patrick prête sa voix. C'est le trappeur le plus jeune du groupe, c'est donc en toute logique qu'il soit doublé pour la vf par une voix jeune également. Patrick avait 24 ans en 1971.
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bannon
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par bannon »

Merci Musselshell pour cette magnifique leçon d'histoire. Pour ma part , je savais le film tiré d'un fait authentique, mais je ne le croyais pas si proche de la réalité.
On peut pardonner à Richard C.Sarafian d'avoir un peu malmené les lieux et la chronologie. Aucune transposition d'un film historique n'est entièrement fidèle à la réalité. Richard C.Serafian s'en est quand même considérablement approché :!:
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Eager Beaver
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Eager Beaver »

Je viens de lire dans Splendeur du western (p86) de Jean-louis Leutrat et Suzanne Liandrat-Guigues que Jack De Witt, scénariste du convoi sauvage, était également celui d'un homme nommé Cheval et le retour d'un homme nommé Cheval.
En quoi nos aficionados voient une cohérence entre ces trois films (outre ce qui saute aux yeux: la présence du même acteur dans les trois, un film et sa suite, le monde sauvage et les indiens). Autrement dit, où s'insère le convoi sauvage dans ce tryptique? En quoi sont ils complémentaires, quelles variations pour quels thèmes?
Y a de quoi dire, et on peut encore en parler pendant 15 jours, allez, hop hop hop à vos claviers :lol:
Jean-Louis
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Jean-Louis »

:) Jack DeWitt d'après sa note sur IMDb a bosser sur une quarantaine de scripts dont 14 Westerns cinématographiques
et 2 épisodes de feuilletons.

Il a travaillé effectivement sur A Man Called Horse d'après un court récit de Dorothy M. Johnson, il a remis ça 6 ans plus tard
toujours sur la base du travail de Dorothy M. Johnson, Richard Harris voulant prolonger leur collaboration (là j'extrapole) Jack DeWitt
entouré de plusieurs autres auteurs (il a à ce moment là 80 ans passés) nous accouche de : Triumphs of a Man Called Horse.
Il a c'est vrai entre temps en 1970 signé le script de Man in the Wilderness.

Je me trompe peut-être, sans doute même, mais j'ai l'impression que cet homme avait surtout besoin de croûter, pas de délivrer des messages.
Le convoi sauvage et Un homme nommé cheval dans une moindre mesure étant des exceptions.


Liste des westerns auxquels Jack DeWitt a collaboré :

Don Ricardo Returns (1946) Inédit en France
Bells of San Fernando (1947) Inédit en France
Canadian Pacific (1949) Inédit en France
Fargo (1952) Inédit en France
Battles of Chief Pontiac (1952) Inédit en France (B) Pontiac l'Invincible]
Son of Belle Starr (1953) Inédit en France
Gun Belt (1953) Tempête sur le Texas
Sitting Bull (1954) Sitting Bull
Oregon Passage (1957) Le Repaire de l'Aigle Noir
Five Guns to Tombstone (1960) Inédit en France
A Man Called Horse (1970) Un Homme nommé Cheval
Man in the Wilderness (1971) Le Convoi Sauvage
The Return of a Man Called Horse (1976) La Revanche d'un Homme Nommé Cheval
Triumphs of a Man Called Horse (1982) Le Triomphe d'un Homme Nommé Cheval

Et de 2 épisodes de feuilletons TV

"Cheyenne"
- The Last Train West (1956) TV épisode
"Bronco"
- Montana Passage (1960) TV épisode

Voilà tout ce que m'inspire Jack DeWitt, mais Eager Beaver ne te gène surtout pas développe tes idées, j'aurai grand plaisir à te lire. :wink:
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musselshell
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par musselshell »

Si des parallèles n’enfonçant pas trop de portes ouvertes peuvent être dressés entre les deux premiers films de la saga de Morgan et celle de Bass, il faut effectivement les chercher dans l'écriture de Dewitt...
Le reste n'est pas anecdotique en soit, mais bien connu : au début des années 70, on retourne à la nature, on s'en donne à tout le moins l'illusion, et les meilleurs films sont justement ceux qui ne cachent pas la dimension désillusoire...ils parlent en fait autant de l'époque qui les voit naître que de celle qu’ils dépeignent... Délivrance, s’il n'est pas un western, reste l'un des meilleurs exemples de la stigmatisation de la perversité du mythe de la grande nature américaine, quand on se laisse aller à trop y croire…Avec Jeremiah Johnson, le film de Boorman travaille justement sur la désillusion, même si le premier renforce le mythe tout en en traçant le leurre, alors que le second…bascule carrément dans l’horreur.

Au-delà des contextes communs, l’ouest des années 1820, l’homme blanc seul face à la nature ou à une civilisation aux antipodes de la sienne…les scénarios de Dewitt partagent à l’ évidence une même approche éthique. Le héros passe progressivement de l’illusion à la prise de conscience, de l’incompréhension à l’empathie, du rejet à l’acceptation via l’épreuve…épreuve que les circonstances lui imposent …mais qu’il semble avoir inconsciemment recherchée. Morgan cherche du sens autant que Bass…
L’aristocrate en villégiature vit dans un système de valeurs dont il percevra la vacuité (à tout le moins la relativité) après son parcours chez les Sioux, Bass est prisonnier de sa rancune, d’un quasi mépris de lui-même, puisqu’il se pense incapable de conjuguer la vie à l’ouverture aux autres, à commencer à sa propre progéniture…Dans les deux cas, la wilderness et les autochtones constituent un couple dont le caractère indissociable est bien montré comme une création du blanc ...

Les Sauvages le sont parce que différents, on le savait…Mais Dewitt montre implicitement la réciprocité de la proposition. Il n’adopte pas, dans A Man Called Horse, un point de vue qui ferait qu’un groupe détiendrait des valeurs authentiques alors que l’autre ne saurait que détruire…Point de vue qui nuit toujours, sinon à la démonstration (quoique…), en tous cas aux choses de l’art...
Par ailleurs, on notera une certaine maestria à dépeindre la souffrance, voire une certaine complaisance si on veut ironiser...et là, Richard Harris apporte son grain de sel...Son passage à tabac dans Unforgiven pourrait presque laisser entendre qu'il avait de vagues...prédispositions. :sm32:
C'est beaucoup trop 255 caractères. Je renonce à apposer une signature.
Ah...c'est la limite haute...
Je renonce quand même. Je sais pas quoi dire, de toutes façons.
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Eager Beaver »

Comme je l'ai mentionné précédemment, je n'ai qu'un lointain souvenir de ces films, il m'est donc difficile de contribuer concrètement au débat. En revanche, je trouve le thème passionnant et essaie, tant que faire ce peut, de maintenir rougeoyantes les braises autour du feu du mois en cours.
Le téléscopage du thème et de mes lectures s'est donc imposé de lui-même. Les réponses proposées ont démontré la pertinence de la démarche. Bravo et merci à vous deux. Deux points de vue qui s'affrontent et se complètent m'incitent à creuser la question de la désillusion du retour à la nature, une sorte de déconstruction du mythe au sein du mythe.
Il me semble que dans tous les cas, le parcours de prise de conscience du héros passe par une phase de perte de conscience, due à des épreuves "qu’il semble avoir inconsciemment recherchées", pour reprendre la formule de Musselshell.
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musselshell
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par musselshell »

Rien n'est en effet plus culturel, pour faire vite, que la fascination pour l'idée de nature, que l'idée de "retour à..." L'idée même de retour signe la sophistication des sociétés qui y font référence...L'idée n'est d'ailleurs pas si vieille que cela...C'est grosso modo le Romantisme allemand qui la porte le plus, tant en peinture qu'en musique ou en littérature...Et ce n'est en aucun cas paradoxal si l'idée, pure idée, voit le jour dans le contexte d'une valorisation sans cesse plus prégnante de l'individu, d'une part, de la conscience nationale, d'autre part...Télescopage, voire simultanéité étrange, qui va mener de Rousseau à la valorisation de la pureté...et le ver sera vite dans le fruit (la pureté devient celle de la race...). Les Anglo-américains proposeront leur variante, dont le western sera l'un des héritiers...La nature se conquier, obligatoirement, pour devoir être regrettée. Mouvement perpétuel de la pensée, de la conscience...qu'on peut finalement mettre en parallèle avec les devenirs individuels. La marche forcée de la jeunesse laisse place à la nostalgie de ce qui a été, de ce que l'on croit avoir été...et on ne revient, par définition, jamais sur ses pas.
Quand Jeremiah Johnson part dans la montagne, il quitte le monde pour un leurre, puisque le monde, son monde, il l'emmène à la semelle de ses bottes (les mocassins ne changeront rien à l'affaire)...Il l'emmène doublement: en tant qu'individu, puisqu'il reste un animal social, en tant que trappeur, puisqu'il participe du mouvement qui détruira ce qu'il imagine relever de l'enfance du monde. On arrête pas le temps.
C'est beaucoup trop 255 caractères. Je renonce à apposer une signature.
Ah...c'est la limite haute...
Je renonce quand même. Je sais pas quoi dire, de toutes façons.
Jean-Louis
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Re: Le convoi sauvage - Man in the Wilderness - 1971 - Richard C. Sarafian

Message par Jean-Louis »

Planque-toi canard !

Etonnant cette séquence, près de Bass les canards vivent leur vie, le considèrent-ils déjà mort ?

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Les Indiens passent au galop, les canards, imperturbables, ne s'inquiètent pas, ils sont comme eux ils vivent harmonieusement dans la nature.


Si ce titre est dans la sélection des Westerns autour du feu, c'est suite au choix de l'un d'entre nous et bien ce dernier ne s'est toujours pas manifesté...





2000 tout rond...
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