Mon nom est Personne - Il mio nome è Nessuno - 1973 - Tonino Valerii

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Cole Armin
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Mon nom est Personne - Il mio nome è Nessuno - 1973 - Tonino Valerii

Message par Cole Armin »

Pour ceux qui ne connaissent pas le film, par ICI


Attention, les SPOILER sont Autorisés, donc ne lisez pas ce topic avant d'avoir vu le film.


Tous les documents sont à poster dans ce topic:
http://westernmovies.free.fr/Forums/vie ... php?t=3810


Que le débat commence!
Modifié en dernier par Cole Armin le 01 nov. 2006 11:15, modifié 1 fois.
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Message par Personne »

Résumé d'allociné!

Jack Beauregard, légende de l'Ouest, désire mettre un terme à sa carrière de pistolero et envisage de s'embarquer pour l'Europe. Mais un jeune admirateur, affirmant s'appeler Personne, ne l'entend pas de cette oreille. Il veut faire entrer Beauregard dans l'Histoire en l'amenant à combattre la Horde sauvage.

Avec:

Terence Hill .... Nobody
Henry Fonda .... Jack Beauregard
Jean Martin .... Sullivan
Piero Lulli .... Sheriff
Mario Brega .... Pedro
Marc Mazza .... Don John
Benito Stefanelli .... Porteley
Alexander Allerson
Rainer Peets .... Big Gun (as Remus Peets)
Antoine Saint-John .... Scape (as Antoine Saint John)
Franco Angrisano .... Ferroviere
Tommy Polgár
Antonio Palombi
Hubert Mittendorf (as Humbert Mittendorf)
Emil Feist
Carla Mancini .... Mother
Luigi Antonio Guerra .... Official (as Antonio Luigi Guerra)
Angelo Novi
Ullrich Müller .... Man
Claus Schmidt .... Man
R.G. Armstrong .... Honest John (uncredited)
Karl Braun .... Jim (uncredited)
Leo Gordon .... Red (uncredited)
Steve Kanaly .... False barber (uncredited)
Geoffrey Lewis .... Leader of the Wild Bunch (uncredited)
Neil Summers .... Squirrel (uncredited)

Notez qu'il n'y a qu'une seule femme de crédité au générique, la mère et encore on la voit de dos il me semble.
On peut juste voir une danseuse de Flamenco et une prostitué! Aucun des personnages féminin n'ouvre la bouche si ce n'est la prostitué pour glousser!

Détail, détail, je sais! Mais je repense au personnage de Mamita que je n'ai pas cité! Dans l'auberge au début, elle prépare un plat de fayots pour nos héros, on l'entend, mais on ne la vois pas!!

Personne serait t'il un film misogyne? En fait je ne crois pas, ma femme adorant ce film également, mais j'aimerai avoir d'autres avis, féminins par exemple sur la représentation des femmes dans ce film!

Bon, il y a bien d'autres sujets que cette place des femmes dans ce western! :lol:
Il y a tellement de choses à dire! Film de Sergio Leone ou de Tonino Valerii? Les références à d'autres westerns, la musique de Morricone, l'alternance des scénes d'humour avec les scénes plus tendues, les acteurs, les dialogues devenus cultes... je connais même ceux des poules au début... Cot- coot -cot - cot - cot!!! :lol:
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Carcasse
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Message par Carcasse »

Je vais commencer par ce que j'apprécie dans ce film.
Et surtout par la première scène qui lance le sujet du film : trois cavaliers, véritables tueurs à front bas, arrivent dans une ville minuscule.
Tout de suite, on sent une atmosphère particulière : une mise en lumière, des plans, des mouvements de caméra... En bref, une prise de hauteur inhabituelle chez Valerii.
La scène est d'évidence un petit auto-pastiche de "Il était une fois dans l'Ouest". Les 3 hommes ne diront pas un mot et fonctionneront à l'intimidation (crainte immédiatement mise en valeur par le champ-contrechamp intérieur-extérieur sur le garçon). Comme dans le film précité, il enfermeront, ici le barbier et son fils, sans véritable violence physique... La force de l'influence et l'influence de la force ! :mrgreen:
Tout fonctionnera avec des bruitages amplifliés à l'extrème et même la musique sera utilisée ponctuellement comme telle.
L'un des tueurs ira traire une vache, habillé et filmé comme il est, l'ironie est flagrante : l'autre brossera un cheval de manière exagérée, le tout bien amplifié par les sons.
Jack Beauregard ne parlera pas non plus, tant qu'il fera partie de cette scène (il ne parle que dans une autre scène incrustée).
A la fin, il délivrera le barbier de la manière minimaliste dont Bronson délivrait le chef de gare (dans cette fameuse scène que Leone avait coupée au montage et qui a été, hélas, rajoutée dans le DVD) et partira toujours sans dire un mot.

Dialogue enfin entre le barbier et son fils (je vous la fais courte) :
Il y a quelqu'un de plus rapide que lui ?
Plus rapide ? Non petit. Personne !

Aussitôt, le titre rentre dans l'écran et la la musique démarre :
Mon nom est Personne.

Je peux vous dire que j'ai vu ce film au cinéma lors de sa sortie : ça en jette ! :D

Là, on se dit : "Personne est plus rapide que Beauregard" et on pense assister à un "vrai" duel final.
Or, le scénario nous prend intelligemment à contre-pied. "Personne" n'a nulle envie de combattre Beauregard. Il est son plus grand fan, il connaît tout de sa carrière : aujourd'hui, il en collectionnerait sans doute les vignettes Panini ! :P
"Personne" ne veut pas devenir quelqu'un, il veut rester personne. Un individu anonyme ne faisant pas partie de l'histoire, mais qui va néanmoins intervenir afin que son scénario idéal, parfait, se déroule comme il l'a rêvé. Un peu comme si nous pouvions rentrer dans l'écran pour influencer le cours d'un film, il est un enfant qui assiste au spectacle et qui veut voir son histoire bien se terminer tandis que son héros rentre dans la légende.

Jack Beauregard est une sorte de Clay Blaisdell (l'Homme aux colts d'or) désabusé et durci par l'âge qui désire mettre fin à sa carrière le plus vite possible et de n'importe quelle manière. Il va devoir se coltiner cette mouche du coche qui l'emmène vers une fin qu'il ne souhaite pas.

Alors voila un scénario qui me plait énormément. La réalisation et les moyens étant là, ce film aurait pu être vraiment très bien, d'autant que la musique de Morricone, sous sa direction, savait s'y montrer parfaitement emphatique, ironique ou nostalgique en fonction des besoins.

Mais dans ce film, il y a mon ami Térence Hill. Grimaçant et cabotinant à l'extrème, il tire sans arrêt la couverture à lui en nous ressortant son Trinita. Des scènes de duel accélérées, aux baffes retentissantes, nous aurons le droit à toute la panoplie : il ne manque guère que les scènes de pets (pourtant, nous avions bien des fayots à l'auberge ! :mrgreen: ). Et voila un film où le personnage qui eût dû être, certes gamin, mais assez discret crève par trop l'écran... Dommage de passer si près !
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Breccio
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Message par Breccio »

Un film qui me tient particulièrement à cœur. Longtemps j’ai dû me contenter d’un souvenir ému, avant de le redécouvrir enfin grâce au somptueux DVD Canal+. Merci, merci, monsieur Gans !

Il me semble que le principal axe de réflexion – mais pas le seul, loin de là –, ce qui devrait devenir le fil rouge de nos échanges, c’est la relation maître/élève. Ce motif est présent dès les débuts du western léonien (et du western italien en général), cf. Et pour quelques dollars de plus. Il est au cœur du deuxième western de Tonino Valerii, Le Dernier jour de la colère. Il définit les relations Leone/Valerii, relations tumultueuses comme on l’a vu. Et il est bien entendu central dans la relation Beauregard/Personne.

Par ailleurs, mais sans doute est-ce complémentaire, ce film traite aussi de la fin d’une époque et du début d’une autre. C’est là un motif courant dans le western, à tel point qu’on a pu parler de western crépusculaire, mais on est ici assez loin d’une ambiance à la Peckinpah – pourtant nommément cité – et je parlerai plutôt de film élégiaque.

Ce motif de la fin d’une époque revient fréquemment dans le cinéma et même la littérature du 20e siècle. Aussi bizarre que cela paraisse, je ferais un parallèle avec deux autres œuvres : L’Etoffe des héros, de Philip Kaufman, d’après Tom Wolfe, et… Le Seigneur des anneaux, de Peter Jackson, d’après J.R.R. Tolkien. Chez Kaufman, on a la même relation inter-génération entre le pilote d’essai Chuck Yeager (Sam Shepard) et l’équipe des astronautes (Ed Harris & co), avec une rupture supplémentaire du fait que l’héroïsme individuel doit céder la place à l’héroïsme collectif. (A noter que d’après William Goldman, auteur d’une première mouture de l’adaptation, Kaufman a orienté le film dans le sens de la glorification nostalgique du héros solitaire, à l’inverse des intentions de Tom Wolfe). Dans Le Seigneur des anneaux, c’est littéralement le monde entier qui change, et nombre des héros ne sont que de pâles reliques d’un passé assimilé à un véritable Age d’Or. (Et, à la fin, ils s’en vont à bord d’un bateau, comme Beauregard ;-))

Pour revenir à Mon nom est Personne, le film est d’autant plus riche que sa matière même porte la trace des conflits inhérents à son thème : qui en est l’auteur ? le maître Leone ou l’élève Valerii ? Voilà un débat qui a déjà fait rage sur ce forum. On sait que Leone a bel et bien réalisé certaines scènes, mais Valerii revendique néanmoins la paternité du film. Pour trancher, il faudrait faire une liste des scènes litigieuses à partir des sources disponibles (biographie de Leone par Frayling, commentaire audio de Valerii sur le DVD) et comparer ce film avec les précédents westerns de Valerii : Lanky, l’homme à la carabine, Le Dernier Jour de la colère, Texas et Une raison pour vivre, une raison pour mourir. En se gardant d’oublier que Valerii disposait sans doute de moyens bien plus importants pour Personne.

Je terminerai en disant qu’il faut aussi célébrer la texture de ce film : les petits bonheurs de mise en scène ou de comédie, les apparitions de trognes connues (Mario Brega, Piero Lulli… et ce petit vieux dont on ignore toujours le nom !), la beauté ocre de l’image…

Je conclu sur une note personnelle : j’aurai peut-être le temps de lire vos contributions demain, à l’issue d’une journée qui s’annonce chargée, mais je serai en déplacement de vendredi à l’aube à lundi soir.

B.
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Message par Personne »

Selon Valerii dans le doc du dvd studio Canal, Leone aurait tourné la scéne de la pissotière dans la gare avec ce face à face étonnant entre Hill et le conducteur de train(Carcasse il y a même un pet pendant cette scène, que tu dois, j'en suis sûr, adorer! :lol: ). Valerii la trouvait trop vulgaire mais Leone avait le final cut.
La deuxième scène est celle du saloon, ou Personne fait un concours de tir en buvant du whisky! Hill voulait absolument tourner avec Leone au moins une fois dans sa vie et cela aurait donné cette scéne.

La scéne de la pissotière semble anecdotique, mais je trouve qu'Hill y est éblouissant! Son talent comique éclate! Pas de paroles, juste des mouvements du visage et quelques sifflements pendant ce "duel"!

D'ailleurs Personne ne tuera personne pendant ce film, laissant la basse besogne à Beauregard, il utilise son flingue face à Beauregard, pour couper une corde et ridiculiser des bandits, un nain qui se moquait de lui ou pendant ce fameux concours dans le saloon!

Le défi du saloon est à mon avis là aussi un grand moment et une scène devenue plus que culte!
Là aussi le travail comique d'Hill y est formidable! Tout est dans son visage, ses expressions, ses petits clin d'oeil, les bruits qu'il fait, ses petites moqueries, ses regards dans le miroir...
Alors oui après il y a la scène des baffes qui peut paraître incongrue, mais sans ce genre de scène Mon nom est Personne n'aurait pas cette originalité, cette aura culte qui fait que ce film traverse les années sans prendre une seule ride.
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Carcasse
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Message par Carcasse »

Personne a écrit :... Alors oui après il y a la scène des baffes qui peut paraître incongrue, mais sans ce genre de scène Mon nom est Personne n'aurait pas cette originalité...
Cette originalité... dans les scènes de baffes de Terence Hill ?
Euh... Là tu abuses ! :mrgreen:
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Message par Personne »

Mais si, je te le dis, Personne est unique! :mrgreen:
Tous ses duels sont comique, sauf le dernier qui est finalement lui aussi une grosse farce! Quel émotion la première fois que j'ai vu cette fin! Fonda grimaçant et s'agenouillant blessé, cette fois sans ralenti et sous la musique de Morricone... Ca vie ne tenait finalement qu'à un fil!!!! :lol:
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mortimer
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Message par mortimer »

La scène se passe dans un vieux magasin, sur la façade on peut lire une inscription à moitiée effacée par le temps, celle d'un ancien cinéma de quartier...


Dans la boutique un vieil homme range des photos usées par le temps à ses côtés un jeune homme le regarde faire en silence. Au milieu des photos le jeune homme en choisit une au hasard, il la regarde longuement :



-"Qui est-ce" ?

-"Personne" répond le vieil homme en esquissant un léger sourire

-"Comment ça ? on ne sait pas qui est cet acteur ?"

-"si tu préféres, disons que c'est un acteur qui aurait pû être quelqu'un et qui finalement ne fût personne..."

-"c'est un peu triste comme histoire, non ?"

-"pourquoi ? toutes les histoires ont une fin, celle du western comme les autres c'est pourquoi la venue de personne était nécessaire"

-"c'est bien dommage tout de même que l'on ne tourne plus de westerns"

-"oui, désormais ils sont dans les livres d'histoire...tiens c'est curieux justement je me souviens qu'il disait ça dans le film"

-"alors si j'ai bien compris c'est un film plutôt intéressant"

-"Oui très intéressant mais malheureusement personne n'écoute personne"

-"pas même lorsqu'il dit quelque chose d'intéressant" ?

-"justement c'est là le piège ! le film ne se résume pas à une série de claques, mais le public hélas ne s'en rend pas compte".

-"je commence à comprendre : en fait c'est nous qui méritons des baffes lorsque nous allons voir certains films qui sont mauvais"

-"Voilà tu as compris, mais le gars qui à fait ça ne pouvait pas le dire aussi directement puisque c'est lui qui à lancé le genre, il pouvait donc difficilement s'en plaindre"

-"Et de qui donc est ce film, de Leone ou de Valerii ?".

-"Toute l'astuce est là petit : c'est le film de personne bien entendu.."



:arrow: petit hommage personnel à un film qui à bercé mon enfance (je pense d'ailleurs qu'il s'agit d'un des westerns les plus diffusés à la TV). Pour ma part j'y vois (d'ou la morale que je glisse à la fin de mon texte)moins de Valerii que l'on ne pense et certainement plus de Leone que l'on ne dit :wink:
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fa
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Message par fa »

« Mon nom est personne » est un film d’une rare finesse et d’une rare intelligence tant dans le scénario que dans la réalisation. Ce qui permet de s’interroger sur le véritable travail de Valerii… Ce film étant très largement supérieur à l’ensemble de sa filmo, bien qu’elle ne soit pas dénuée d’intérêt pour autant. Doit-on envisager l’apport de Valerri en comparaison à celui de Kershner dans « L’Empire contre attaque » ou encore de Anakin dans « Le jour le plus long » ou de Fleming dans « Autant en emporte le vent » par exemple ? Soit des techniciens de talent au service du véritable auteur du film qui œuvre dans l’ombre … Il est vrai que, outre le fait que Leone ai signé un certain nombre de scène (le final, l’intro, la foire, les « chiotes… », la bataille… (c’est du moins ce qu’affirment certains historiens du cinéma – Valérii lui, logiquement tend à réduire le rôle de Leone)), son impact en tant que Producteur, maître des marionnettes, fut à l’évidence énorme à mon avis.

Le film ressemble à une guignolade comme le western spagh. en a tant fait. Mais une guignolade à part, présence d’Henry Fonda, « acteur sérieux », oblige. Ce dernier joue donc le rôle de Jack Beauregard, un Européen devenu célèbre dans l’Ouest ; le nom laisse même envisager un Français…Vieille légende de l’ouest, comme Fonda est une vieille légende des westerns (ce sera d’ailleurs son dernier) qui aspire à un retour aux sources, voulant abandonner la terre de ses exploits pour mourir tranquillement et dans l’anonymat en Europe. Déjà, à travers cet unique personnage, superbe et effacé, perce le vrai sujet de Leone : faire un film critique vis-à-vis du western Européen.
Leone est un grand admirateur du western « classique » à l’américaine, auquel il a rendu un fabuleux hommage avec son « Il était une fois dans l’Ouest ». Tout admiratif qu’il soit, il est pourtant bien conscient que dans ces années 70, ce western là est mort. Mais, alors que le Spagh. remporte alors de vives succès, en particulier avec les Trinita (avec Terence Hill justement), Leone entend avec « Personne » affirmer combien ce western Européen là fait fausse route. Leone en effet déteste les Trinita et tout le cinéma « vulgaire et grossier » qu’il véhicule.
Il va donc nous présenter un fabuleux champ/contre-Champ opposant le western classique défendu par Fonda au « minable » (à ses yeux) western-fayots Européen dont Terence Hill est l’ icône. Ainsi donc il oppose Fonda à Hill. Un Fonda marqué volontairement par la retenue, par l’effacement… Un peu comme si ce « vieux » western qu’il représente était déjà un peu absent. Mais Leone connaît son acteur et sait jouer sur son regard expressif et célèbre. Ce n’est pour rien s’il s’appelle « Beauregard »…L’aura de Beauregard/Fonda n'est donc nullement atteinte. Et le contraste entre cette aura et l’éffacement du personnage (de l’acteur) contribue à l’alchimie et au discours du film.
Cette dualité s’oppose automatiquement au jeu extrême de Terence Hill, voulu comme tel par contraste avec Fonda (c’est bien pour cela que Leone se charge lui-même de la réalisation des scènes les plus grotesques du film, les accentuant jusqu’à l’outrance. Comme il se charge des scènes les plus fortes avec Fonda, celles qui marquent sont appartenance à la légende).
Exubérant, grossier, Hill est l’opposé de Beauregard/Fonda… Et cette opposition est la base même du film. D’un coté le western classique de Ford ; de l’autre les « nanars européens » que déteste Leone et dont Hill (presque exclusivement dirigé par Leone) est le représentant… Tout les oppose à première vue ; mais en vérité, au-delà de cette dénonciation; il y à comme une état d’âme…

Fonda est toujours cette légende de l'ouest (comprenez du Western). Mais est-ce lui qui a précipité la venue de "personne", venu prendre la suite (et non remplacer) de son plus âgé confrère (il y a là à l’évidence une filiation). Mais l’acharnement de « Personne » à faire entrer dans l’histoire son ainé n’est pas non plus un hasard... Leone veut-il montrer que le western Européen est l’héritier du western classique ? Certainement oui. Pas seulement par la chronologie, mais aussi par la forme. Ainsi l’intro du film, si elle souligne déjà cette filiation en faisant effectivement ouvertement référence à « Il était une fois dans l’Ouest » le plus « Américain » des westerns de Leone, un « détail » d’importance va nous démontrer que l’humour « tarte-à-la-crème » des Européens est un héritage des westerns classiques. En effet, si le film se termine par le doigt bien placé de Terence Hill (j’allais dire Personne , mais à ce moment là il est devenu quelqu’un comme le rappelle justement et logiquement la voix off de Fonda… Marquant par le fait également une filiation et donc un héritage) ; cette image répond à la même image en introduction du pistolet de Fonda aussi bien placé. Si Hill est l’héritier de Fonda, l’humour européen est bien né dans l’humour des westerns classique.
Alors si les Trinita sont les héritiers des films de Ford et autres Hawks, pourquoi Leone s’acharne-t-il à démontrer par opposition le ridicule des premiers tout en acceptant pourtant la filiation ? Plus curieux encore, en montrant un Terence Hill qui fait entrer un Fonda dans l’histoire, ne sous-entend il pas que sans Trinita le westerns Américains sombreraient dans l’oubli ? Le discours n’est pas si simple… En vérité si le film rend hommage aux westerns classiques, il souligne aussi, par excès de prétention ou de lucidité, que Leone lui-même ne se reconnaît pas dans ces westerns dont on dit pourtant qu’il est le fondateur. Et puis le grande Sergio en profite pour saluer un autre maître des westerns, un maître américain qui a déjà, à plusieurs reprises, avoué devoir beaucoup à Leone : Sam Peckinpah. Omniprésent tout au long du film (via la Horde Sauvage, et la tombe de Peckinpah entre autre…) le réalisateur de « La Horde Sauvage » est un des descendants les plus remarquable et les plus décriés des westerns américains. Leone ici lui rend non seulement hommage mais lui envoie aussi un message : « Les défenseurs du western classique veulent te détruire pour entrer dans l’histoire et le western européen ne t’aidera pas« . Il ne faut pas se fier en effet au apparences… Si Hill porte les mêmes vêtements que cette Horde Sauvage, et s’il semble si bien la connaître ; On peut se demander comment… Certains ont affirmé que Personne était un ancien de la Horde Sauvage. Mais alors pourquoi les membres de celle-ci ne le reconnaissent pas quand ils se croisent ? Rien ne permet d’affirmer que Personne est un ancien de la Horde. Ses vêtements ? Ses connaissances ? Tout ceci pour nous dire que si Trinita et les siens ont parfois l’apparence des films de Peckinpah (le rapprochement a souvent été fait, au travers des scènes de violence en particulier), ce n’est qu’une illusion. Du cinéma en sorte…
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mortimer
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Message par mortimer »

fa a écrit :
Leone en effet déteste les Trinita et tout le cinéma « vulgaire et grossier » qu’il véhicule.
Il va donc nous présenter un fabuleux champ/contre-Champ opposant le western classique défendu par Fonda au « minable » (à ses yeux) western-fayots Européen dont Terence Hill est l’ icône. Ainsi donc il oppose Fonda à Hill.
tout à fait exact Leone déclarait sans cesse : "on avait dit de moi que j'étais le père du western spaghetti, ce qui m'inquiétais beaucoup, en effet je n'avais eu que des enfants débiles" :lol:

parfois encore il raconte combien il était outré par le public qui allait voir des films du genre de ceux de Maciste, Hercule et autres personnages ridicules, il ajoutait : "il faudrait leur mettre des baffes avant de leur donner leur ticket d'entrée" :P d'ou les multilples scènes de claques dans mon nom est personne , Leone dénonce ("la comédie châtie les moeurs en riant" disait déjà Molière) les goûts du public en matière de cinéma depuis le milieu des années 60.

Sinon le regard de Fonda est terrible, il se demande en regardant Terence Hill : est-ce un idiot ou joue-t-il à l'idiot ? le plus souvent pétrifié par les outrances de Hill, Fonda ne trouve de réponse qu'en mettant des lunettes comme s'il se disait que tout ce qu'il vient de voir n'est pas possible :lol: :lol: la scène culmine d'ailleurs dans un tableau improbable (mais typique des outrances du spagh) d'un homme seul face à une horde de cavaliers qu'il exterminera cependant sans ressentir la moindre difficulté. L'intervention de Terence Hill est moins là pour sauver Fonda qui ne paraît pas vraiment en danger que pour montrer combien tout ceci est grotesque et redonner une fois encore le signal de la comédie
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Message par fa »

Bien vu Mortimer :wink:
Pour revenir sur l'importance du regard de Fonda (surtout face aux fabuleux yeux bleus de Hill) : souviens-toi de la dernière fois où l'on voit Fonda dans ce film... Sur le bateau, il fait alors un extraordinaire regard caméra, avec enfin un sourire... Un regard qui s'adresse directement au public :wink:
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Message par mortimer »

exact :wink:

j'espère que notre vision du film sera partagée par nos camarades du forum :D

dans les bonus de mon nom est personne Terence Hill dans une courte apparition souligne dans un passage émouvant, une phrase de Leone disant "voilà l'ouest tel que je l'aime" on comprend mieux la photo dans les livres d'histoire, tout ça c'est encore un message très clair, en référence aux classiques : les légendes il ne faut pas y toucher.


Mon nom est personne est une tentative pour mettre fin à ce que le western avait produit de plus mauvais, Leone outre le fait d'avoir ouvert un genre qui l'a dépassé (le western spaghetti) avait en outre le plus grand mal à se tourner vers autre chose (depuis des années il voulait faire son fameux il était une fois en Amérique) mais sans cesse on ne lui demandait qu'une chose : "quand allez-vous faire un nouveau western"?. C'est pourquoi avec le film de Valerii (car c'est le film de Valerii :wink: ) Leone saisit l'occasion de mettre un terme à tout ceci. Le malentendu viendra de là. Valerii à mon sens ne saisit pas l'intention de Leone (on le voit dans les bonus il se plaint de la scène des chiottes par exemple, en disant que c'était grotesque, 40 ans après le pauvre n'a toujours pas compris que Leone se servait de lui pour démolir le western spaghetti et c'est pour cela qu'il rajoutait de telles scènes).
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Message par fa »

Valerii n'avait rien compris à Leone en général. Le meilleur moyen de s'en rendre compte, c'est encore dans les bonus du DVD quand Valerii explique que Leone voulait imposer qu'une scène soit filmer d'une façon précise contre l'avis de Valerii. Leone savait en effet que le décors de la scène se situait en rapport à un autre décors qui devait se situer juste à coté, mais ici hors-champ. Le décors hors champs n'existait plus et Valerii voulait se servir de l'espace ainsi laissé libre pour filmer. Leone s'y opposa parceque disait-il, le spectateur et les personnages savent que là où Valerii voulaient mettre sa camera, il y avait normalement un autre décors et donc l'impossibilité physique de placer une caméra. Pour Leone y placer une caméra risquait de modifier les espaces. Il avait raison... "40 ans après le pauvre n'a toujours pas compris " :wink:

Pour la fameuse scène de la destruction de la Horde Sauvage. Leone manipule tout le monde. Il nous montre des images fixes qui deviennent des photos dans des livres d'histoire... Première question : ou est le photographe ? Il n'y en a pas... On est là dans le symbole. Les livres et photos montrés, en echo à la voix off de Hill et aux coups de fusils de Fonda, ne servent à priori qu'à symboliser cette entrée dans l'histoire. Le western de Ford entre dans l'histoire grâce au Western spagh. et contre la Horde Sauvage/Peckinpah. Mais justement, qui est photographié et affiché dans les livres d'Histoire... Ce n'est ni Fonda ni Hill. Mais bien la Horde Sauvage, qui d'ailleurs n'est pas détruite à ce moment là... Pour Leone, le vainqueur sera bien Peckinpah qui lui semblait à ce moment là le seul à faire encore des westerns digne de ce nom...
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Message par Carcasse »

mortimer a écrit :j'espère que notre vision du film sera partagée par nos camarades du forum :D
Je ne sais pas si votre vision sera partagés par tous. Personnellement, si une grande partie m'agrée, quelques détails dans l'analyse et dans ses conclusions me laissent un poil sceptique, mais nous aurons l'occasion d'en rediscuter un peu plus tard. Aujourd'hui, je ne pourrai pas.

En tout état de cause, c'est bigrement intéressant ce que vous nous racontez là, les gars ! :applaudis_6:
Pfiuuu ! Z'avez sacrément bossé dur, chapeau ! :roll:


Et qui va être particulièrement content ? Personne ! :mrgreen:
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Fredge
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Message par Fredge »

fa a écrit :Valerii n'avait rien compris à Leone en général. Le meilleur moyen de s'en rendre compte, c'est encore dans les bonus du DVD quand Valerii explique que Leone voulait imposer qu'une scène soit filmer d'une façon précise contre l'avis de Valerii. Leone savait en effet que le décors de la scène se situait en rapport à un autre décors qui devait se situer juste à coté, mais ici hors-champ. Le décors hors champs n'existait plus et Valerii voulait se servir de l'espace ainsi laissé libre pour filmer. Leone s'y opposa parceque disait-il, le spectateur et les personnages savent que là où Valerii voulaient mettre sa camera, il y avait normalement un autre décors et donc l'impossibilité physique de placer une caméra. Pour Leone y placer une caméra risquait de modifier les espaces. Il avait raison... "40 ans après le pauvre n'a toujours pas compris " :wink:
Mmmmh, sujet délicat, ça!

J'ai plutôt été convaincu par ce que Valerii dit dans les bonus, et à son avantage!
Il avait d'ailleurs parlé d'un livre dans lequel il allait "s'expliquer" sur toute une série de choses, et sur Leone notamment.

Grimaldi et Donati, dans les bonus de "Pour quelques dollars de plus", remettent également les pendules à l'heure en démystifiant le génie Leone et en félicitant entre autres (de mémoire) Dallamano pour la photo et Simi pour les décors...

Je ne tiens pas à prendre la défense des uns ou de l'autre mais signaler qu'il s'agit d'une vraie controverse : "Qu'aurait fait Leone sans ses collaborateurs, dont Valerii fait partie bien évidemment comme assistant directeur dans les deux premiers dollars?"

Je pense humblement que nousne sommes pas en mesure de répondre à cette question..
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