Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

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limpyChris
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par limpyChris »

Bon sang, faudra que je lise tout à tête reposée depuis le lien de Jean-Louis ...
Alors, ce soir, juste pour dire "Oui, j'avais noté aussi ce plan de Royal Dano faisant le guet avec un livre ... image rarissime dans un western non parodique, surtout d'un cow-boy (pas une femme ou un -faux- 'pied tendre' ...) un peu mauvais garçon de surcroît."
Je suis un vieux Peau-Rouge solitaire qui ne marchera jamais en file indienne.

- You've seen too many westerns, old man.
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gilson
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par gilson »

Ce film est perplexifiant, perplexifieux, ce que vous préférez. En tout cas, je suis perplexe. Je lis : RAY a fait un enfant dans le dos à W BOND. D’accord. Mais est-ce qu’il n’en a pas fait un aux deux femmes aussi ? Car enfin, tout ce que vous voudrez, mais cette scène du duel, si elle n’est pas une parodie des scènes de duel de western, est ridicule*. Et si elle est parodique, est-ce que le film ne prend pas une autre tournure ? Continue-t-il à être une belle histoire d’amour ? Se préoccupe-t-on de parodier, de satiriser, quand on raconte une belle histoire d’amour ?

D’ailleurs, j’ai des questions mais pas de réponse : sentiment, impression, seulement. J’avais employé le mot « dépaysement ». « Déplacement » m’arrange davantage, ici ( !!), mais ce n’est pas très loin : au risque de me fourvoyer complètement, -pas trouvé à emprunter le bouquin dont parlait Chip-, RAY me semble avoir voulu faire passer ailleurs les fronts d’opposition : Bien et Mal ? pfuittt !! Pas non plus d’Indiens, qui sont bien commodes pour raconter. Le Mal sera interne, et, mieux, il sera un Mal limité dans le temps (costume de deuil). Mieux encore, il sera incarné par une femme habillée en vert (Robin des Bois, Peter Pan, vert de l’Eden ?), aux mines de gamine, puis en noir quand on rigolera moins. Et chaque camp n’en sera pas un : auberge espagnole, cette cabane, ou une maison des courants d’air. Et dans un casino, qu’est-ce qu’on fait ? On joue à essayer de changer de camp aussi (pauvre et riche). Et les personnages n’arrêtent pas de se « déterritorialiser » : Johnny G est en fait Johnny L, le cow-boy phtisique est un rat de bibliothèque après avoir été on ne sait quoi puis dévaliseur de banque, le chef est danseur –mondain ?- (vous parlez d’un machin, pour un coveboua, comme dit Pike), Emma le désire et elle lui fiche un pruneau en plein ciboulot, froidement, non mais, Vienna ne veut pas de violence et une des premières choses qu’elle fait dans le film, c’est de prendre son pistraque (son fidèle pistraque, prêt à servir, vous avez remarqué ? Elle ne le sort pas d’une armoire ou d’un tiroir « d’où elle espérait ne jamais le tirer » -cliché-, il me semble: il est là, à l'attendre sagement) déguisée en Zorro, Bart est un vieux copain à Emma, qui lui faisait bouffer des sauterelles quand ils étaient petits, etc, etc. Très bien, j’apprécie comme tout le monde. Mais ce duel ? Ces déplacements ne tiennent pas jusqu’au bout, il me semble, et ça coince à la fin. En tout cas, je me demande où cela nous a menés. Enfin, je ne suis pas le seul à être perplexifié, perplexifouillé : il paraît que c’est le film le plus discuté dans les ciné-clubs. Je veux bien le croire.


*surtout avec ces hommes qui se cachent où ils peuvent et laissent les dames régler leurs comptes à OK Cabane. C’est quand même énorme. D’accord : ils sentent bien que cela règlera tout ; mais on y met les formes, quand même, messieurs, messieurs !!! Le monde à l’envers! Et le monde à l’envers dans tout le reste du film : qu’une femme ait une forte personnalité, d’accord. On voit cela souvent, et qui sait ce qui se passe derrière les murs des maisons ? Et on a vu cela aussi dans des films (« 40 Guns », bien sûr, ou le film de LANG), mais des films-limite, des films-frontière, si j’ose dire. Dans la réalité, les femmes, en général influencent les hommes plutôt qu’elles n‘agissent à leur place. Dans le monde, dans la réalité-monde du western, en tout cas. Pourquoi ces feux de la rampe, ici ? (pas qu’une expression : on les allume, les éteint plusieurs fois dans le film, et ils déclenchent l’autodafé du casino de Vienna). Pourquoi cet anachronisme quant au poids des femmes sur les choses? Si on veut dire que les femmes sont sacrément importantes, vous savez, qu’elles ont pris une fichue place dans notre société, pourquoi choisir un western, et, surtout, pour dire quelque chose que chacun sait depuis déjà pas mal de temps (années folles, années 30, etc : on a compris, depuis le temps) ?
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COWBOY PAT-EL ZORRO
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par COWBOY PAT-EL ZORRO »

J'ai enfin réussi à revoir ce film et,malgré mon admiration pour le style de Nicholas RAY depuis que je découvris enfant à la télé un de ses grands films,dans un tout autre genre cependant,LES 55 JOURS DE PEKIN...Je suis aussi perdu que notre ami gilson...Pour reprendre(peut-être ai-je mal lu car je passe un peu à la va-vite...)certains de ses avis:40 GUNS de Fuller qu'il cite me paraît en effet être un bien meilleur exemple de femme forte chef de gang...

J'ai toujours été qq peu surpris par ce film et il semblerait que ce soit toujours le cas malgré certains acteurs que j'apprécie(Sterling HAYDEN mais aussi Ward BOND,Royal DANO...J'en oublie certainement en cette heure matinale(8h31)quand le jour se lève(POUR LA FILLE DU MOTEL... :lol: A JACEDDY!))...Mais bien que n'ayant absolument rien contre ce film en lui-même ni contre RAY si je devais citer un autre film de ce dernier je lui préfère de beaucoup,bien que peut-être pas vraiment western,ce serait le superbe LA FORÊT INTERDITE(WIND ACROSS THE EVERGLADES)(1957)avec Christopher PLUMMER et Burl IVES...
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gilson
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par gilson »

« Dans ma maison, qui n’est pas ma maison… », disait PREVERT. Envie d’écrire, paraphrasant : Dans ce western qui n’est pas un western. Ou plutôt, qui, comme la médecine, l’éducation, la sécu, est un western à au moins deux vitesses (je dis au moins car, vous verrez, on nous trouvera bientôt une troisième, puis une quatrième. C’est comme les Mondes des économistes ou les hépatites).

Parce que, notez, d’abord, qu’il est bizarrement fichu : en gros, même si la 1ère partie gronde (début, irruption des lyncheurs), on est dans l’irénisme, l’œcuménisme (cigarette, danse) ; c’est dans la seconde partie du film que les vrais problèmes apparaissent (après l’attaque de la banque). Donc, solution, puis problème, puis solution, après pas mal de dégâts. Mais je voulais surtout dire ce qui suit.

Lu hier la discussion à laquelle renvoyait Jean-Louis. M’a surtout intéressé cette notion de personnage absent, pour Johnny G ou L. Même si c’est très discutable (il propose des solutions, agit, sauve Vienna, tue le méchant-gros-sale gosse, tout de même), l’idée me séduit : en découpant un peu, en rafistolant, on peut, peut-être, en faire ceci : avec « Johnny Guitar », on a affaire à un western qui emprunte (pour ne pas employer l’affreux :« revisite ») les parcours connus, les subvertit (les épingle, si vous préférez ; je préfère), et par ce regard critique sur les « lieux » (communs), réussit à composer une partition très originale, très poétique (la poésie étant, on le sait, souvent produit d’un décalage). Concrètement : la pendaison : d’habitude, on y va assez gaiement. Là, avec Vienna, personne ne la sent plus trop. De ce fait, la pendaison en vient à sembler une absolue étrangeté, une inquiétante étrangeté, pour employer la célèbre expression, quelque chose de quasi insensé. Souvenez-vous, aussi : le casino de Vienna : absolu dépaysement, surtout, quand, à deux reprises, le croupier fait tourner la roulette au milieu d’un table de jeu déserte, dans un lieu d’où toute vie ordinaire est absente : filles, bastringue, coups cul sec au zinc, où êtes-vous, mes chers vieux clichés ? Que vous étiez rassurants ! Là, le coup à boire est seulement le prélude à la bagarre, après avoir été l’occasion de l’intervention du sauveur (Sauveur ?) dans l’opposition Vienna/lyncheurs* -verre rattrapé au vol-. Relations hommes/femmes, à présent, pour finir : même si les femmes y apparaissent dans une forme de toute-puissance, et les hommes sous influence et obscurs objets du désir, représentation totalement à rebrousse-poil de ce qu’on voit d’ordinaire, là encore, leur voix est capitale dans cette polyphonie : profonde différenciation dans la bande, humanisation des lyncheurs, dont chacun sait et a dit qu’un « posse » était une meute, accession à la reconnaissance du personnage joué par CARRADINE, personnage très intéressant, très fouillé, de Turkey, homme-enfant, qui parvient, vous avez dû le remarquer, à réveiller … l’instinct maternel chez Vienna (pourquoi le cache-t-elle ? Parce que, à ce moment, c’est un enfant qu’il faut rassurer et consoler)**, etc, etc.

Tout cela, que je ne fais que suggérer, et assez mal, pour dire une chose : RAY a réussi à donner une épaisseur, une consistance très particulières à un western, qui, par définition presque, ne s’accommode pas forcément de ce genre d’acrobaties. Construction, nature des « composants », il me semble qu’on a, avec « Johnny Guitar », je ne sais pas si ces comparaisons sont bonnes, une composition en trompe-l’oeil, en creux, à la fois déroutante et fascinante. Tout ça pour 5 malheureuses petites pages de commentaires sur le forum : les gars, il faut vous secouer. Je finis par me demander si Jamesbond n’a pas un peu raison !!! :)

*mais il faudrait encore raffiner : la provocation de Bart est elle-même complexe : même si personne ne se fait trop d’illusions sur ses intentions, il reste un possible, un autre plan : que Bart envisage, en disant qu’il veut faire la connaissance de Johnny, de faire de lui un membre de la bande.

**Vienna qui n’en est pas à une métamorphose près : elle devient parfaite petite ménagère pour faire la popote et faire cuire SES œufs à SON Johnny.
Modifié en dernier par gilson le 25 oct. 2011 9:35, modifié 1 fois.
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Pike BISHOP
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par Pike BISHOP »

"ON" (qui ? les critiques officiels..Pas les gugusses de W-M qui écrivent avec leur nombril et font de grosses taches et d'énormes pattes de mouches..°
Donc, ON a qualifié "JOHNNY GUITAR" de BAROQUE FLAMBOYANT !!!!... Pourquoi flamboyant..passque ça flamboie fort le feu de bois avec la
Vienna'house ?...Sans doute pour le distinguer d'autres baroques qui viendront plus tard d'Europe, qui s'ils sont innovants et décapants sur certains sujets
en ont oublié beauté, poésie et flamboiement...
Prenez la musique de TOTOR YOUNG...Même principe que son opus sur "SAMSON et DALILAH" Une ouverture presque tonitruante, pompeuse ou pompière
Une dizaine d'accords, puis une mélodie à la douceur extrême, slow ou valse lente..Final en célébrissime chanson de PEGGY LEE....
Le film se permet les mêmes discordances ou accords....Des explosions...Un saloon hors de tout dans la tempête de sable....
Une galerie masculine et deux femmes...Une ville qu'on ne voit presque jamais...Juste un plan sur une banque.... Un pont, Un chalet sur pieux
derrière une cascade.. Des lieux presque surréalistes ou feuilletonnesques et des personnages qui sont presque tous à l'envers de ce qu'ils sont...
Des passions toutes dirigées et refoulées par leurs destinataires....Jusqu'au moment ou exhacerbées, elles ne se résolvent plus que par
le renoncement, l'acceptation, ou l'excès de violence...
le KID aime VIENNA, qui l'aime bien, sans plus...Plus jeune, elle lui aurait cédé..Par plaisir, pour sa belle gueule...
VIENNA ne cède plus...Elle a trop usé de ses charmes pour obtenir ce qu'elle a...Gambling house et tracé du chemin de fer..Elle n'a qu'à attendre...
VIENNA n'aime plus...Parce qu'une "gâchette" lui a brisé le coeur..VIENNA croit que son coeur est mort..Qu'elle va pouvoir employer JOHNNY
en patronne, en toute froideur....
EMMA aime le KID...Qui le sait..En joue et s'en moque...EMMA est laide...Hommasse..Autoritaire..Sans doute possessive (de son frère dont on ne verra
que le cadavre...Qu'elle oublie le temps d'une danse)...Elle serait la seule femme..Riche..ça fait oublier la laideur..Le caractère assez volontaire
pour obtenir..Mais voilà..Il y en a une autre..Une étrangère..Plus belle..Plus mystérieuse..Emma ne sait pas que le coeur de VIENNA est froid..
EMMA la jalouse, l'envie, la hait ...L'autre tempère, évite les provocations...Excédée, EMMA préfèrera le KID mort avec VIENNA plutôt qu'elle délaissée..
Les autres..Tous sous le charme de VIENNA...C'est la seule (?) sinon difficile à comprendre devant sa froideur..Mais respectueux de sa rigueur...
Les employés...Le banquier...Le financier....
Dans la bande..outre le KID...TURKEY l'aime aussi...Encore comme une maman..Ou la fiancée de Papa (le KID)...COREY l'apprécie, mais lui a pour
fiancée la tuberculose...et BART LONERGAN....???? COREY dit qu'il n'aime que lui- même ??? oh, oh !!! pas sûr....
En tous cas, BART n'aime pas les femmes...Mais est-il insensible au KID ? et au nouveau venu...JOHNNY ? Il fait le matamore, se prend une rouste
puis apprends que l'autre est une gâchette..Tente une approche " MES AMIS M'APPELLENT BART !" " J'EN PRENDS NOTE Mr LONERGAN !"...
Refoulé le gros, il va réagir à la EMMA..Tout détruire...trahir...
Les autres..Shérif, posse..Sensibles quand même à la féminité de VIENNA, hésitent, alternent, se laissent manipuler comme des masses stupides
victimes de la propagande du moment..Mais finiront par tourner le dos à EMMA..Trop laide..trop mauvaise..
Restent McIVERS..Lui n'aime que lui..Se croit le chef, le meneur, l'imposant, le maître..Il n'est que l'imbécile suprême..Il n'a rien compris à rien..
la brute stupide venue au pouvoir...Ne comprenant plus rien à ces haines féminines et abandonnant la partie...
et JOHNNY..."Gachette" paumée ? repentie ? Pas tout à fait, les gestes reviennent vite..le colt virevolte dans ses mains..TURKEY fait les frais de son
instinct de tueur..Mais l'homme aime encore..Veut se donner une seconde chance...Avec patience, méthode et calme..Il va y arriver...
En s'effaçant et en agissant calmement..A la nuit...Seul...Dans son dialogue avec VIENNA (sublime) puis avec un couteau..Sacrifant le gamin
blessé pour sauver celle qu'il aime...Il va la protéger..Du feu..Par l'eau, par l'air ..Et la sachant assez forte..affronter la rivale en un gunfight
final décimant presque tout le casting...KID, BART, EMMA.. (COREY avant par traitrise)...
Montée des passions..Déchaînement et pourtant une suite narrative d'une parfaite logique, quasi théâtrale...
VIENNA a recommencé à vivre...Elle est redevenue femme (elle fait cuire les oeufs à SON homme)...Toutes les jalousies déclenchées sont
exterminées...Un passage symbolique sous la cascade...Ils sont seuls, ils n'ont plus rien que leur amour..La vie est devant eux..
PEGGY LEE peut chanter...
If they move, kill'em !!
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yves 120
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par yves 120 »

:D Un régal Pike , je prend presque autant de plaisir à te lire sur ce" Johnny Guitar " que de repenser ou ( revoir ) ce western , d 'ailleurs tu m'as donné envie d 'écouter ( Peggy Lee ) :wink: merci :beer1:

Perso , sans déconner :!: je vois et ressens exactement le film , de la même façon d 'ont tu le décris :num1 mais voilà j 'ai pas la plume pour l ' écrire , mais assez de sensibilité pour le dire en tout cas chapeau :sm57:
" Qu' est - ce qu 'un revolver ? Ni pire ni mieux qu 'un autre outil , une hache , une pelle ou une pioche .
Qu 'il en sorte du bien ou du mal dépend de qui s'en sert . " SHANE
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yves 120
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par yves 120 »

yves 120 a écrit ::D Un régal Pike , je prend presque autant de plaisir à te lire sur ce" Johnny Guitar " que de repenser ou ( revoir ) ce western , d 'ailleurs tu m'as donné envie d 'écouter ( Peggy Lee ) :wink: merci :beer1:

Perso , sans déconner :!: je vois et ressens exactement le film , de la même façon d 'ont tu le décris :num1 mais voilà j 'ai pas la plume pour l ' écrire , mais assez de sensibilité pour le dire ( tiens ça rime ! :) ) en tout cas chapeau :sm57:
Ce qui ne veux pas dire , que je n 'apprécie pas aussi certains( d ' entre vous ) , spécialiste , " du westerns autour du feu " :wink: :beer1:
" Qu' est - ce qu 'un revolver ? Ni pire ni mieux qu 'un autre outil , une hache , une pelle ou une pioche .
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par Eager Beaver »

Gilson tu nous parles d'aspects satiriques ou gaguesques. Tes remarques sont recevables car fondées mais flirtent avec l'écueil de la lecture anachronique qui biaise l'exercice.

J'en veux pour exemple le plan final où l’héroïne tombe dans les bras d'un Sterling Hayden grandiose de suffisance héroïque tel le sergent noir de Ford en haut de sa colline.
Il y a 15-20 ans chez vu Johnny guitar un samedi soir dans un ciné club. La salle était comble et a complètement marché dans le film, à l'exception de ce plan final qui a généré moultes ricanements et éclats de rire.
Je me suis rappelé avoir eu la même réaction à la fin de Morocco (1930), lorsqu'elle se jette dans le sable brulant du désert sur les traces de son homme quand ce couillon de Gary Cooper, bêta d’héroïsme repart faire youkaidi youkaida avec ses potes de la légion.

Aujourd'hui tout cela est grotesque mais on est dans les canons de l'époque.

Il est donc délicat de deviner dans quelle mesure Ray joue un tour à ses femmes et dans quelle mesure il joue à mort avec les canons du genre (qui produisent aujourd'hui une zone de relecture) pour pouvoir non pas faire éclater le genre d'un coup, mais par scènes successives, qui restent encadrées par le côté sérial que vous avez tous décrit précédemment, permettant notamment d'insérer un message politique subliminal, en livrant une ouvre très personnelle.
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par tepepa »

J'ai vu ce film tout petit. C'était un peu comme une sorte de légende dans la famille, ouah, il y a Johnny Guitar qui passe à la télé! Je n'avais comme souvenir que la scène de pendaison.

Je n'avais donc pas du tout prévu de parler de ce film, mais j'ai trouvé la VHS pour dix centimes dans un vide-grenier, aux cotés de deux Bud Spencer: Malabar à New York et Malabar à Miami.

Pike ne va pas me croire, mais j'ai laissé les deux Bud Spencer et j'ai pris le Johnny Guitar :lol: .
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par gilson »

N’ose plus trop parler, à présent, mais puisque tu me fais l’honneur de tenir compte de mes propos, Eager Beaver, je reprends brièvement la parole. Deux choses très simples : 1) Une lecture autre qu’anachronique est-elle possible, pour un spectateur lambda comme ton serviteur, s’il regarde le film, quoi ?, 50 ans après (à la louche) ? L’air du temps nous colle à la peau, c’est évident. Mais cela n’ôte rien au fondé de ta remarque. Il faudrait, en effet, se démultiplier, pour avoir un regard plus équilibré sur un film. 2) N’y a-t-il pas des films de la même époque qui soient exempts de ce que j’avais cru remarquer dans ce film comme, au moins, méritant étonnement, interrogation ? Des films aux formes mieux dessinées pour affronter le temps ? Intelligence et équilibre me paraissent précisément l’apanage d’un film solide. Je ne dis pas du tout que ce film soit bête et déséquilibré, et j'apprécie la fragilité, la singularité, me contentant, simplement, d’être surpris par certaines choses, proposant des questions. C’est tout. :) :beer1:
Modifié en dernier par gilson le 25 oct. 2011 9:37, modifié 1 fois.
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par tepepa »

Le début est tout bonnement formidable. Des explosions dans la montagne, une attaque de diligence vu de loin, presque genre "Tiens, une attaque de diligence...", du vent, de la poussière de partout, et une guitare.

C'est déjà une bonne intro, mais ça continue, une énorme batisse au milieu de nulle part, le bruit de la roulette et du vent, toujours aucun dialogue. La tension monte, et quand ça se met à parler, c'est pas pour causer météo!

Les échanges haineux commencent, avec Vienna au milieu de son escalier. La précision des dialogues, la répartie des protagonistes sont ébouriffantes. Arrivent des bandits dont l'un s'appelle Dancing Kid. On apprécie le parallèle du nom avec celui de Johnny Guitar. L'esthétisme du huis clos étouffant continue avec la toux de l'un des bandits et ce verre vide qui tourne....

"C'est mon nom, vous voulez le changer?". Le film avance, mais la tension ne faiblit pas. Mieux, elle va crescendo. Le héros n'a pas d'arme. Mais on sait que c'est du pipeau, parce qu'on regarde un western, et que dans les westerns, les héros qui n'ont pas d'armes sont tous des as du révolver (à l'exception de Hoot Gibson).

On est un peu sur un nuage.
Modifié en dernier par tepepa le 23 oct. 2011 16:27, modifié 1 fois.
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par tepepa »

Et puis le soufflé retombe. La "révélation" de la virtuosité aux armes du guitariste tombe à plat, et limite trop vite. La "révélation" du passé commun amoureux de Vienna et Johnny tombe aussi à plat vu qu'on n'en attendait pas moins. Le film devient extrêmement bavard, avec un enchaînement de phrases bateaux ("Quand l'amour se consume, il ne reste que des cendres"), de dialogues à double-entendus barbants, de souvenirs, de regrets et de larmes de mauvais mélodrame. On étouffe, on voudrait sortir à tout prix de ce saloon, vas-y Johnny, aide la à descendre son lustre, qu'on se sorte de là.

Le film manquant aussi singulièrement d'humour. Par exemple, après qu'il ait fini de se battre avec Ernest Borgnine, j'aurais bien vu Johnny Guitar demander "Barman, un whisky, ça me donne soif ces petits jeux moi!", mais non, on est dans le sérieux, dans le pathos sans aucun recul, faut bien qu'on comprenne la dureté du truc, faut pas rester là monsieur. Mais pourquoi, quel est donc le message du truc?
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par tepepa »

Pour le message, faudra attendre. Pour l'instant, on respire un peu. Il y a une cascade sous laquelle il faut passer pour arriver au repère des bandits. Haaa, un truc de serial, et ici vraiment un hommage puisque absolument pas crédible. D'habitude, derrière une cascade, il y a une grotte, ce qui nous donne par exemple dans The Toll Gate de belles scènes contrastées avec les yeux fixes de William S. Hart. Là derrière la cascade, il y a des montagnes et une cabane que l'on doit donc croire ignorées de tout le pays. Attention, il y a peut-être même un T-Rex planqué quelque part... (dans les scènes coupées je crois)

(je taquine, hein, il va sans dire que c'est un excellent film).

Puis, un chien traverse une rue. Encore un truc que cet immonde arriviste de Leone a sauvagement plagié :mrgreen: .
Modifié en dernier par tepepa le 23 oct. 2011 19:16, modifié 1 fois.
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par tepepa »

Le nuage remonte. L'attaque de la banque est formidable. Le posse constitué d'hommes en noir est d'un esthétisme classieux, où la beauté naît du contraste. Contraste du noir et blanc avec toutes les couleurs chaudes éparpillées dans le film. Incongruité de la tenue au regard de son utilisation: la chasse à l'homme.

Le personnage d'Emma se dessine. Elle devient beaucoup plus intéressante que Vienna, engoncée dans ses vêtements d'hommes et ses mystères. Emma a droit à des plans fulgurants, parfois brefs comme lorsqu'elle attend sur le pont "ses" hommes parce que - trop pressée - elle a pris trop d'avance, parfois longs comme lorsqu'elle met le feu au saloon. Le message aussi se dessine: L'amour refoulé, ça fait faire des conneries, la justice expéditive, c'est pô bien. OK.

Dans l'ensemble, la redite de la confrontation dans le saloon et la scène du lynchage fonctionnent très bien, mais sont plombées par des incohérences mélodramatiques. Tom se fait descendre, et Vienna trouve le temps de lui parler gentiment, de lui expliquer qu'il n'est pas insignifiant alors qu'il était bien un personnage insignifiant dans le film. Un genre de scène obligée alors que l'importance du personnage ne la justifiait pas, ça vous sort du film.

Et hop, à peine sauvée du lynchage, on remet ça dans les galeries de la vieille mine: "Je t'aime. Moi non plus. Je t'ai aimé jadis. Et toi? Mais vas-tu le dire boudiou?!" Zzzzzzz roôôo zzzzzzzz.
Modifié en dernier par tepepa le 23 oct. 2011 19:17, modifié 4 fois.
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Re: Johnny Guitar - 1954 - Nicholas Ray

Message par tepepa »

La dernière partie, là haut dans la montagne interdite, ressemble à du mauvais spagh. J'adore! Un duel féminin, déjà, fallait oser. Les yeux sont exorbités, les machoires serrées à bloc. Mais la mort du Dancing Kid, c'est la cerise sur la gateau. :lol:

Ami forumeur, j'en ai rajouté un peu, par-ci par là dans mes interventions ci-dessus, dans la provoc de bas étage, sauras-tu déceler où? Au final, malgré quelques passages que j'ai soulignés,j'ai beaucoup aimé ce film. N'en déplaise à ceux qui détestent le genre, j'y ai retrouvé une atmosphère, une esthétique que l'on retrouvera plus tard dans le western européen. J'y ai aussi retrouvé, comme mentionné par quelqu'un, le jeu outré, la dramaturgie et les effets du muet. :applaudis_6:
Modifié en dernier par tepepa le 23 oct. 2011 19:14, modifié 1 fois.
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